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Tant que l’usage de ces machines est restreint à un seul manufacturier ou à un nombre très-limité de concurrents, ils peuvent en recueillir des profits exceptionnels ; parce qu’ils ont alors la faculté de vendre leurs marchandises à des prix très-supérieurs aux frais de production. Mais aussitôt que les machinés se répandent au sein de toute l’industrie, le prix du marché se rapproche des frais de production actuelle et ne donne plus que des profits modérés et habituels.

Pendant le cours du déplacement du capital d’une industrie à l’autre, les profits de celle vers laquelle il se dirige seront relativement élevés ; mais cette hausse cessera dès l’instant où les fonds nécessaires y auront été mis en œuvre. Le commerce ouvre aux peuples deux voies de richesse : — l’une par l’accroissement du taux général des profits ; accroissement qui, selon moi, ne peut avoir lieu qu’en vertu d’un approvisionnement à bas prix et qui ne profite qu’à ceux qui tirent un revenu de leurs capitaux, à titre de fermier, de manufacturier, de commerçant, ou de capitaliste prêtant à intérêt ; — l’autre, par l’abondance des marchandises et par une réduction de leur valeur d’échange à laquelle tous les membres de la société participent. Dans le premier cas, le revenu du pays a reçu un véritable accroissement ; dans le second, le même revenu se multiplie en procurant à tous une part plus large dès nécessités et du luxe de notre existence.

C’est sous ce dernier point de vue[1], que les nations sont appelées à recueillir des bienfaits de l’extension du commerce, de la division du travail dans les manufactures et de l’invention de puissantes machines. Tous ces phénomènes ajoutent à la masse des denrées et contribuent énergiquement à l’aisance et au, bonheur de l’humanité ; mais ils n’ont aucune influence sur le taux dés profits, car ils n’augmentent pas la quantité des produits relativement aux frais d’exploitation agricole, et il est impossible que les autres profits s’élèvent, si ceux de la terre demeurent stationnaires ou rétrogrades.

Le prix, ou plutôt la valeur des subsistances est donc le régulateur suprême des profits. Tout ce qui tend à faciliter la production alimentaire tend à élever le taux des profits, quelle que soit, d’ailleurs ? l’abondance ou la rareté ultérieure des marchandises. Au contraire, tout ce qui tend à augmenter les frais de production sans accroître en même temps la masse des subsistances[2], doit nécessairement abais-

  1. Excepté lorsque le développement du commerce nous permet d’obtenir les subsistances à des prix véritablement plus modérés.
  2. Si, par l’effet du commerce extérieur ou de l’invention des machines, le