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situation n’est, jamais plus florissante qu’aux époques où les subsistances sont rares et chères ; tandis que pour les autres membres de la famille humaine une nourriture à bas prix est un immense bienfait.

Si des rentes élevées et des profits minimes, — car ces deux termes sont inséparables et coexistants, — sont l’effet naturel de la marche des circonstances, on ne doit jamais en faire surgir des motifs de plaintes. Ils demeurent tous deux comme les preuves les plus irréfragables de richesse et de prospérité, et témoignent d’une population nombreuse, relativement à la fertilité du sol. Les profits généraux du capital reposent entièrement sur ceux de la dernière portion de capital consacrée à la terre. Dès lors, quand bien même les propriétaires abandonneraient la totalité de leurs fermages, ils ne parviendraient ni à élever le taux général des profits, ni à diminuer le prix du blé pour le consommateur. Cet abandon gratuit aurait pour unique effet, comme l’a dit M. Malthus, de procurer les loisirs du gentleman aux fermiers dont les terres acquittent aujourd’hui une rente ; il les mettrait à même de dépenser cette fraction du revenu général qui constitue aujourd’hui la part du propriétaire, et tout se réduirait à un déclassement.

La richesse d’une nation se mesure, non d’après l’abondance de son numéraire ou le haut prix pécuniaire pour lequel ses marchandises ont cours, mais bien d’après l’abondance des objets qui contribuent à son bien-être et à ses jouissances. Quoique cette proposition rencontre peu d’adversaires, il est beaucoup de personnes qui n’envisagent qu’avec effroi une diminution de leur revenu en argent, et cela dans le cas même où leur revenu ainsi réduit aurait assez grandi en valeur échangeable pour leur permettre d’accroître la satisfaction de ces besoins ou de ces superfluités qui accompagnent notre existence.

Si donc les principes que nous avons énoncés relativement à la rente et au profit sont exacts, les profits généraux du capital ne peuvent s’accroître qu’en raison d’une baisse dans la valeur échangeable des subsistances, et cette baisse elle-même ne peut résulter que de trois causes :

1o Une réduction des salaires réels du travail qui permette au fermier d’apporter sur le marché un excédant de produits plus considérable ;

2o Des perfectionnements introduits dans les méthodes agronomiques ou dans les instruments de culture, et tendant aussi à accroître cet excédant.