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totale des productions du pays n’en souffre que peu de variation, — le capital employé restant le même, — ces produits ne seront plus ni aussi abondants ni à si bon marché, et le changement dans l’emploi des capitaux entraînera une grande détresse.

Si, par l’emploi de 10,000 l. st. dans la fabrication des tissus de coton destinés à l’exportation, nous importions chaque année trois mille paires de bas de soie de la valeur de 2,000 l., et que, par l’interruption du commerce, nous fussions obligés de détourner ce capital de la fabrication des tissus de coton, pour l’employer dans celle des bas, nous continuerions toujours à obtenir des bas pour la valeur de 2,000 l., pourvu qu’aucune partie du capital n’eût été détruite ; mais au lieu d’avoir trois mille paires de bas, nous pourrions n’en avoir que deux mille cinq cents. Dans le passage des capitaux de l’industrie du coton à celle des bas de soie, les particuliers pourraient éprouver une grande gêne, sans que néanmoins la valeur du capital national en souffrit beaucoup, et sans que la quantité de la production annuelle se trouvât diminuée[1].

Une guerre qui éclate après une longue paix, ou une paix qui succède à une longue guerre, occasionne en général une grande détresse dans le commerce. Ces événements changent considérablement la nature des emplois auxquels les capitaux étaient consacrés auparavant dans chaque pays ; et pendant que s’en opère le nouveau classement, le capital fixe dort, s’anéantit même parfois, et les ouvriers n’ont plus assez de travail. La durée de cette crise sera plus ou moins longue, selon le degré de répugnance que la plupart des hommes éprouvent à quitter le genre d’industrie dans lequel ils ont pendant longtemps été dans l’habitude d’employer leur capital. La détresse est souvent

  1. « Le commerce nous permet d’aller chercher une marchandise dans les lieux où elle existe et de la transporter dans d’autres lieux où on la consomme. Il nous donne donc les moyens d’accroître la valeur d’une marchandise de toute la différence entre les prix courants de ces différentes localités. » — J.-B. Say.

    Cela est parfaitement vrai. Mais comment se crée cette valeur additionnelle ? En ajoutant aux frais de production : 1o les frais de transport ; 2o les profits afférents au capital avancé par le marchand. — La marchandise indiquée par l’auteur haussera de valeur par les raisons mêmes qui font hausser celle de tous les autres produits, c’est-à-dire par le surcroît de travail consacré à leur production et à leur transport, avant qu’elles atteignent le consommateur. Il ne faut donc pas considérer ceci comme un des avantages qui naissent du commerce. En examinant cette question de plus près, on trouve que les bienfaits du commerce se réduisent à nous permettre d’acquérir, non des objets plus chers, mais des objets plus utiles. (Note de l’Auteur.)