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44 l. Un pareil impôt ne peut donc, dans aucun cas, affecter le propriétaire.

Un impôt sur les profits du capital n’a jamais d’effet sur la rente en nature ; mais la rente en argent varie selon le prix du blé. Au contraire, un impôt sur les produits immédiats de la terre, ou une dîme, affecte toujours les rentes en nature, et laisse en général les rentes en argent dans le même état. Dans une autre partie de cet ouvrage, j’ai dit que si un impôt territorial d’une valeur égale en argent était mis sur toutes sortes de terres en culture, sans égard pour leurs différents degrés de fertilité, cette contribution serait très-inégale dans son opération, car ce serait un profit pour le propriétaire des terres les plus fertiles. Un tel impôt ferait hausser le prix du blé à proportion de la charge supportée par le fermier du plus mauvais terrain ; mais cette augmentation de prix étant obtenue par l’excédant des produits récoltés sur les meilleures terres, les fermiers de ces terres auraient un avantage pendant la durée de leurs baux, et à leur expiration cet avantage resterait au propriétaire sous la forme d’une augmentation dans le taux de la rente.

L’effet d’un impôt réparti d’une manière égale sur les profits du fermier est précisément semblable ; un tel impôt augmente la rente en argent des propriétaires, si l’argent conserve la même valeur ; mais comme les profits de tous les autres commerces sont imposés aussi bien que les profits du fermier, et qu’en conséquence les prix de toutes les marchandises, comme celui du blé, ont haussé, le propriétaire perd autant par l’augmentation du prix en argent des marchandises et du blé, qu’il gagne par la hausse de sa rente. Si l’argent haussait de valeur, et si toutes les choses, après l’établissement d’un impôt sur les profits des capitaux, tombaient à leurs anciens prix, la rente redeviendrait aussi ce qu’elle était auparavant. Le propriétaire recevrait la même rente en argent, et il aurait tous les objets qu’il achetait avec cet argent à leurs anciens prix ; en sorte que, dans tous les cas, il continuerait a ne pas payer l’impôt[1].

Ce fait est réellement curieux. En imposant les profits du fermier, il se trouve que sa charge n’est pas plus lourde que s’il avait

  1. Il serait très-avantageux pour les propriétaires que l’impôt atteignît les profits du fermier, plutôt que ceux de tout autre capitaliste. En effet, on asseoirait alors sur les consommateurs de denrées agricoles, une taxe qui profiterait et à l’État et aux maîtres du sol.