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ces rapports suffisent, on se trouve dans l’embarras quand il s’agit de satisfaire aux autres, à moins que cela n’ait lieu de soi-même, ce qui est à démontrer.

4° Dans une première rédaction, Ueberweg ajoutait En tant que le passage est déterminé par le point de départ et celui d’arrivée. Explicite ou implicite, cette incidente est nécessaire ; car toutes les espèces de passages de a’ vers b’ ne sont pas propres à mesurer la direction. Mais il est plusieurs de ces passages qui sont déterminés en quelque façon par le point de départ et celui d’arrivée, la cycloïde par exemple. Cette courbe est-elle une direction ?

5° Dans la définition même de la droite, la qualification de constant suppose la variabilité possible de la direction ; or, nous ne pouvons apprécier la constance ou la variabilité de la direction qu’au moyen d’une direction fixe, constante. Le cercle est manifeste.

6° Cette définition est toute négative, c’est-à-dire que si elle permet, la constance étant supposée facile à constater, de reconnaître si une ligne donnée est droite ou non, elle n’indique cependant aucun moyen de tracer la droite : comment peut-on placer un troisième point c’ dans la direction a’b’ ? La définition ne le dit pas[1].

La définition de la droite que nous venons d’examiner ne supprime pas plus que les autres aucun des postulats ordinaires sur la ligne droite. Elle n’est qu’une proposition sur la droite, un véritable théorème ; de sorte qu’il reste à établir que toute ligne de direction constate est une droite.

Ueberweg a essayé de cette proposition une démonstration dont voici les termes :

La ligne droite (troisième définition) est une ligne déterminée entièrement par deux de ses points ; la direction est déterminée par deux points, celui de départ et celui d’arrivée ; donc la ligne droite est la mesure de la direction.

Ce raisonnement est rigoureux dans le cas où la prémisse est mise sous forme inverse : toute ligne déterminée par deux de ses points est une ligne droite ; ce qui est possible dans la manière de raisonner d’Ueberweg.

  1. Enfin, il y a un cercle vicieux en français dans les mots direction et droite, car droit signifie direct, et l’on définit la direction par la ligne directe. Ce défaut toutefois n’existe pas en allemand où les mots gerade et Richtung semblent avoir des racines différentes.