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plus de coordination. Par exemple, le fait de répondre par un geste à un signal donné est un acte volontaire. Je ne sais pas en quoi il serait plus complexe que les actes réflexes exécutés par la grenouille décapitée ou la mantis religiosa.

Le rapport à la personnalité nous donnera-t-il un signe plus certain ? Sans doute, comme le dit M. Ribot, la volonté peut être considérée comme une réaction du moi, et c’est la définition la plus profonde de la volonté ; mais il faut remarquer, d’abord, que cette définition peut s’accorder avec une théorie qui fera, de tous les phénomènes de l’organisme, des phénomènes volontaires ; d’un autre côté, un fait volontaire n’exprime que la réaction, de la tendance qui domine au moment même où elle se produit, et cette tendance peut être en contradiction avec les tendances les plus profondes, les mieux fixées et les plus fortes en général, avec celles, en un mot, qui constituent le plus réellement le moi de l’individu. En ce cas, le moi peut être représenté aussi bien par des faits regardés généralement comme involontaires, les actes réflexes, le balbutiement, la sueur, etc., qui se manifestent chez l’individu qui commet un peu à regret une action en contradiction avec sa nature intime. Et cette action passe alors pour d’autant plus volontaire qu’elle est accomplie avec plus de peine et de trouble.

Ainsi, nous ne trouvons nulle part un caractère qui distingue nettement, ou à peu près nettement, les phénomènes volontaires. Nous sommes amenés à voir que le terme de volonté n’offre à peu près aucun sens scientifique précis. Il y aurait lieu, peut-être, de ne le conserver que pour la commodité du langage, dans le cas où son emploi ne peut donner lieu à aucun inconvénient, à aucune illusion. L’emploi inconsidéré d’un mot peut, à l’insu du théoricien, fausser toute une théorie. On pourrait le remplacer par les mots : activité motrice, activité intellectuelle, etc., délibération, personnalité, etc., selon les cas, le mot volonté exprime un peu de tout cela et l’exprime mal, sans précision. Pour lui trouver un caractère distinctif, il faudrait admettre le libre arbitre. Encore l’école criticiste ayant mis le libre arbitre dans l’intelligence, empêcherait de voir là un critérium suffisant.

Si nous revenons au sujet spécial de cette notice, nous trouvons d’abord que la proposition, la croyance est un acte de volonté, ne nous offre plus un sens bien intéressant. Examinons un peu, cependant, cette proposition, prenons le sens le plus large du mot volonté, cela revient à dire que nos croyances sont un produit de notre expérience, active ou passive, et de notre constitution personnelle. Au point de vue philosophique, on peut tirer de cette proposition un ar-