Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 12.djvu/532

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


ANALYSES ET COMPTES-RENDUS



Dr Paul Jacoby : Études sur la sélection dans ses rapports avec l’hérédité chez l’homme. In-8. Paris, Germer Baillière.

L’Académie de médecine de Madrid mit au concours pour l’année 1874 la question très neuve qui fait le sujet de ce livre. Elle ne pouvait espérer raisonnablement qu’un homme pût, en peu de temps, embrasser dans sa totalité un problème si complexe, si peu étudié. Aussi M. Jacoby ne prétend pas l’avoir épuisé. Sans parler d’un travail complémentaire qu’il nous promet (p. 322), il n’a abordé que les points les plus importants et les plus probants pour sa thèse. A notre avis, son travail consiste plutôt en contributions d’une grande valeur pour l’étude de la sélection chez l’homme qu’en une esquisse générale du sujet. Il est regrettable que l’auteur, dont l’érudition est très grande, n’ait pas connu ou n’ait pas pu utiliser l’Histoire des sciences et des savants en Europe depuis deux siècles de M. de Candolle. Il eût trouvé dans cet ouvrage ({{pg|312 et suiv.) un essai intéressant sur la sélection dans l’espèce humaine et une esquisse à grands traits du sujet pris dans sa totalité. M. de Candolle examine les effets de la sélection : 1o chez les sauvages ; 2o chez les barbares ou peuples à demi civilisés ; 3o chez les peuples civilisés. Il étudie chez ces derniers les conditions physiques, morales, intellectuelles de la sélection. Ses conclusions ne sont d’ailleurs pas beaucoup plus optimistes que celles de M. Jacoby que nous allons exposer plus loin.

Tout en regrettant que notre auteur n’ait pas profité des travaux de son illustre devancier, nous reconnaissons que les divers points qu’il a choisis dans son sujet ont été creusés profondément et que ses conclusions sont très nettes. Les résultats de sa longue enquête peuvent se résumer en quelques mots : chez l’homme toute supériorité se paye, et la conséquence finale de toute sélection, c’est la dégénérescence.

Quoique cette conclusion soit en désaccord complet avec les opinions qui, de nos jours, ont cours sur ce point, nous la croyons fondée, et nous sommes complètement d’accord avec M. Jacoby. La chimère d’un progrès indéfini de l’espèce humaine est propagée et partagée par tant de bons esprits, elle est acceptée avec tant de confiance qu’on ne remarque pas assez combien sont faibles les raisons qui la soutiennent et fortes les raisons qui la détruisent. Comme la doctrine de l’évolution