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LA LOGIQUE DES SENTIMENTS

raisonnement rationnel tend vers une conclusion, le raisonnement émotionnel vers un but ; il ne vise pas une vérité mais un résultat pratique et il est toujours orienté dans cette direction. Par suite, il a une grande analogie. de nature, d’une part avec l’activité volontaire, d’autre part avec l’activité créatrice (invention, imagination), puisque quand on veut et quand on crée, la fin est posée d’avance et conditionne les moyens.

Le raisonnement intellectuel exige un enchaînement rigoureux. Il suit un ordre linéaire : quelquefois, dans la série des anneaux de cette chaîne, il arrive que l’un d’eux sert de point de départ à un raisonnement subsidiaire ; mais c’est pour renforcer l’argument principal. — Le principe de finalité qui est réductible à une tendance (ou à une croyance), à un désir, procède autrement : il suscite et ordonne les termes par deux procédés principaux : l’accumulation, la gradation.

1o Le procédé par accumulation est simple, mais le plus souvent dépourvu d’art et d’ordre : c’est la forme vulgaire. Il consiste en un entassement de moyens termes propres à suggérer ou à justifier la conclusion, Il sert à exciter, calmer, consoler, persuader et est d’un constant usage

    sur les causes finales ; sur leur rôle réel ou supposé dans la nature inorganique et vivante. Dire que la logique affective est régie par le principe de finalité se réduit à cette constatation indiscutable que l’homme a la faculté de concevoir un but et les moyens pour l’atteindre. J’élimine donc toute hypothèse propre à la métaphysique ou à la théorie de la connaissance, entre autres celle-ci que la finalité consiste à envisager l’effet nécessaire d’une cause opérante comme étant un but qui sollicite cette cause à agir, un motif l’incitant sans cesse à renaître », — hypothèse qui aurait pour conséquence dernière l’identification des deux logiques.