Page:Ribot - La logique des sentiments, Félix Alcan, 1905.djvu/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49
LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS

de la logique des sentiments, mais qui ne dépasse que d’un degré l’association d’idées à base affective ;

Enfin, la forme que nous proposerons d’appeler mixte ou composite. Par son infrastructure, elle appartient à la logique rationnelle et emploie son mécanisme ; par sa superstructure, elle en diffère, empruntant aux émotions des moyens auxiliaires pour persuader ou entraîner. Exemple le discours d’un orateur peu convaincu, mais éloquent. Dans ce cas, le principe est mixte comme le raisonnement lui-même.

Malgré son appareil analytique de décomposition en jugements successifs liés par des rapports, le raisonnement dans son ensemble est une synthèse — le raisonnement affectif comme l’autre. Prenons les exemples cités précédemment (conjecturer l’avenir, justifier la Providence), ils suffiront pour le moment.

Au premier abord, les termes échelonnés entre le point de départ et la conclusion paraissent disparates, juxtaposés plutôt que liés par des rapports déterminables. Voilà pour l’apparence.

En fait, la logique affective a son unité et elle marche vers son but aussi rigoureusement que l’autre. La discontinuité apparente est due aux procédés qu’elle emploie. Voilà pour la réalité.

Le principe qui confère cette unité et régit la logique des sentiments tout entière est le principe de finalité[1]. Le

  1. Les mots fin, finalité sont employés ici dans un sens tout empirique, comme synonyme de but, indépendamment de toute théorie transcendante