décidé à mourir de faim, c’est une non-valeur absolue.
La valeur des choses étant son aptitude à provoquer le désir et la valeur étant proportionnelle à la force du désir, on doit admettre que la notion de la valeur est subjective essentiellement, non absolument.
Telle est la nature des termes dont le raisonnement émotionnel se compose principalement, mais non exclusivement : car, dans la vie ordinaire, comme nous le verrons, rien n’est plus fréquent que les formes mixtes où les concepts intellectuels, et les valeurs coexistent et tendent d’un commun accord vers une même conclusion[1].
II. — Où se rencontrent les jugements de valeur ? La réponse équivaut à une détermination du domaine de la logique des sentiments. Il est très étendu, mais sans limites fixes ; car il varie en fonction de la logique rationnelle, suivant que celle-ci perd ou gagne du terrain. On peut le déterminer négativement en disant qu’il est limité par le savoir positif, objectif, c’est-à-dire par ce
- ↑ J’ai traité ailleurs (Psychologie des sentiments, 1re partie, chap. xiii ; Imagination créatrice, 3e partie, chap. 1) le sujet très obscur des abstraits émotionnels, en montrant par des exemples qu’ils sont plus qu’une simple notation intellectuelle fixée par un mot. Ce sont des extraits d’émotions analogues, antérieurement éprouvées, conservant leur caractère affectif, leur ton émotionnel, mais moins intenses, plus vagues, moins définis que les émotions originelles qu’ils résument. Dans un travail publié assez récemment (Zeitschrift für Psychologie, XXII, p. 194-217) Elsenhans arrive à la même conclusion. De prime abord, il semblerait que ces abstraits émotionnels ont leur place marquée dans le raisonnement affectif. Il n’en est rien. Si peu serrée que soit cette forme de logique, elle exige pourtant quelque enchaînement, et les sentiments ainsi généralisés y sont impropres. Les abstraits émotionnels ont leur emploi ailleurs : dans certaines formes de rêverie, dans la création esthétique, etc. Nous y reviendrons dans le chapitre iv.