C’est qu’au fond, l’idéal auquel tout raisonneur aspire, consciemment ou non, est intellectuel. Nous avons décrit ce stade primitif où le raisonnement spontané se produit sous une forme indifférenciée, mélange hétérogène et sans critique d’arguments subjectifs et objectifs, puériles et solides, nés au hasard des sentiments, de l’imagination, de la raison. Ce n’est pas une hypothèse ; car ce qui s’est passé dans les vieux ages se répète encore sous nos yeux : qu’on observe les sauvages, les enfants ou simplement les hommes de pauvre culture intellectuelle. Puis s’est formé un corps de vérités scientifiques, c’est-à-dire stables et vérifiées, à la fois effet et cause d’une discipline plus sévère de l’esprit. Dès lors, la logique rationnelle a été constituée et est devenue le type, la règle, le guide de tout raisonnement ; mais, en croyant l’imiter, la logique affective n’en a pris que le masque.
Reste à montrer ou plutôt à rappeler l’unité originelle des deux logiques ; elle est dans leur utilité. La tendance à rechercher et à saisir la vérité est une des qualités les plus avantageuses qui ait été dévolue à l’homme et elle a été une des causes de la survivance des plus aptes. La connaissance intellectuelle, strictement confinée, pendant des siècles, à la pratique, s’est risquée peu à peu dans la spéculation pure. Mais la recherche désintéressée, parce qu’elle est un luxe, est inconnue des premières civilisations. Dans l’ordre de la connaissance comme dans l’ordre économique, le luxe est une floraison tardive. La