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LA LOGIQUE DES SENTIMENTS

2o À un degré plus haut, l’association par ressemblance s’affranchit davantage de l’influence des états intellectuels et l’élément émotionnel devient prédominant. C’est le cas signalé par Fouillée où l’association des sentiments par similarité s’étend d’un groupe à un autre, notamment des sentiments sensoriels aux sentiments esthétiques et moraux ou inversement. La douleur de la haine est amère, la joie d’aimer est douce, la tristesse est sombre, le souci est noir, le regret est cuisant[1], » Dans ces couples associés, le premier terme est un sentiment vague ou une émotion, le second terme seul est dérivé d’une impression sensorielle.

3o Enfin il y a l’association affective pure ou du moins un phénomène qui lui ressemble : un sentiment en évoque d’autres de la même nature ou analogues. La joie suscite la bienveillance, la sympathie, l’espérance ; la tristesse engendre l’inquiétude, la misanthropie, le pessimisme ; la peur, une humeur sombre ; la tendresse éveille la pitié ; la colère, le désir de la vengeance, etc., etc.

Toutefois une question délicate se pose : Est-ce une association vraie ? Ne serait-il pas plus exact d’admettre une diffusion des sentiments — terme vague qui convient à un phénomène vague[2] — ou une transformation, événement plus précis qui semble le résultat d’une opération

  1. Fouillée, Psychologie des idées-forces, t. 1, p. 222 (Paris, F. Alcan). L’auteur soutient cette thèse, très probable pour beaucoup de cas, que l’association des idées présuppose celle des émotions qui présuppose celle des Impulsions.
  2. On en trouvera une bonne description dans Rauh, De la méth. dans la psychologie des sentiments, p. 82 (Paris, F, Alcan).