Aussi les symbolistes évitent de décrire pour simplement évoquer, éveiller, suggérer, transformer par allusions une disposition virtuelle en émotion actuelle, — quand ils le peuvent. Leurs descriptions de personnages, paysages, événements sont de simples esquisses ou tout ce qui dessine est effacé, tout ce qui détermine, évité : elles ne traduisent que des dispositions changeantes, des synthèses momentanées, une série fuyante d’états d’âme, des impressions, non reliées entre elles par des liens logiques, qui tour à tour émergent et sombrent au gré de la tendance prédominante, parfois selon les nuances multiples de la même tendance. Que le lecteur se donne la peine de lire avec attention dans leurs œuvres quelques descriptions des gens ou des choses, ayant en apparence le plus d’éclat et de relief ; il lui sera presque impossible de les transformer en une représentation visuelle consistante.
De là aussi leur obscurité : même en écartant ce qui est voulu, artificiel, factice, il reste une cause naturelle, inévitable. Cette poésie étant l’œuvre presque exclusive de l’imagination émotionnelle ne peut se traduire par un ensemble de signes intellectuels, clairs et bien liés.
Je ne m’occupe pas de la valeur esthétique du symbolisme. On sait que cette forme d’art a pénétré aussi dans la peinture, où elle prétend fixer des émotions. J’ignore quel avenir lui est réservé. Tout cela n’est pas de mon sujet et je m’en liens strictement à sa psychologie qui m’a paru instructive. On y voit l’imagination affective