rapporte à ce premier rôle et gravite dans son orbite. » Le thème seul révèle la trempe de l’esprit qui a élaboré l’œuvre entière. « Un motif de Mozart, de Beethoven a son individualité aussi certaine qu’un vers de Goethe ou un jugement de Lessing… Les thèmes ont toute la sûreté d’une citation et l’évidence d’un tableau ; ils sont individuels, personnels, éternels. » La seule concession de Hanslick, c’est que « la musique ne peut pas exprimer le contenu des sentiments, mais seulement leur côté dynamique ». — Telle est la thèse négative sous sa forme la plus radicale ; on ne me reprochera pas de l’avoir affaiblie.
La thèse contraire a été soutenue par plusieurs philosophes (Schelling, Hegel, surtout Schopenhauer) et par la plupart des musiciens. Tout d’abord, il est d’expérience vulgaire que certaines compositions musicales (non toutes) éveillent chez l’auditeur des états émotionnels variés, parfois intenses. Comment supposer que le créateur, uniquement absorbé dans la plastique des formes sonores, reste étranger à cette agitation intérieure, ne ressente rien ? C’est une hypothèse invraisemblable. D’ailleurs, sur ce point, les musiciens ont répondu entre de nombreux témoignages je choisis au hasard. Gluck inventant le morceau de la colère d’Achille dans Iphigénie en Aulide — qui produisit au théâtre un effet prodigieux — livrait dans la rue à de telles extravagances qu’il faillit être arrêté. Berlioz rayait du nombre des musiciens « ceux qui ne sentent pas, qui, maîtres de la théorie, composent une apparence de musique ». Chopin disait :