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LE RAISONNEMENT IMAGINATIF

tion qui s’accomplit qu’à une centaine d’autres dont il justifie péniblement l’échec. Mais tout ceci sort de la logique des sentiments et n’est qu’un effort pour l’étayer.

Notons un dernier caractère du raisonnement divinatoire qui tient à sa nature foncièrement affective, c’est l’insouciance des contradictions. D’une part, il suppose, au moins implicitement, un rapport fixe entre les événements du monde et les événements de la vie humaine même individuelle. D’autre part, l’homme essaie d’échapper à une réponse déplaisante et de tricher avec son destin. L’oracle ou le devin dit « Un tel mourra de telle mort, dans tel endroit », et la victime désignée invente des subterfuges, se flatte de modifier l’avenir. Les entrailles interrogées par l’aruspice sont défavorables à une entreprise de l’État ; on recommence plusieurs fois pour obtenir la réponse favorable. Les historiens de l’antiquité abondent en récits, de ce genre. On désire une réponse vraie, mais on la désire consolante ; ce qui n’est contradictoire que pour la raison. Chaque désir, nous le savons, ne voit et ne veut que sa fin.

III. Quoique la magie et la divination soient étroitement unies par leur nature et leur histoire, la position n’est pas identique dans les deux cas. L’art divinatoire est une interrogation ; il interprète. La magie est une opération, un acte ; elle commande. De là une différence évidente dans leur logique celle de la magie répudie le type affectif pour adopter une forme de raisonnement en