propre compte, devin aussi bien que pêcheur, chasseur ou charpentier. Plus tard, par suite de la division du travail, il se forme une classe spéciale d’interprètes (prêtres, magiciens, médecins, devins) guidés par quelque généralisation empirique, grossière et hasardée, mais qui suppose certaines corrélations entre l’individu et le reste du monde. Ce fut l’œuvre de la philosophie d’atteindre la généralisation complète du principe « que tout se tient dans la nature ». Sauf les Épicuriens, les écoles philosophiques de la Grèce admettaient la divination soit partiellement, avec des restrictions et réserves, soit totalement, comme les Stoïciens, en conséquence de leur théorie du σύμπνοια πάντα. Le christianisme des premiers ages ne l’a pas niée, mais l’attribuait aux démons[1]. Toutefois, il ne faut pas exagérer la valeur de ce principe : il est plus théorique que pratique. Du point de vue de la logique rationnelle, il apparaît comme le fondement de toutes les conjectures divinatoires. Du point de vue de la logique des sentiments, c’est douteux. Nous savons que celle-ci se soucie assez peu des principes et qu’elle semble guidée plutôt par une croyance instinctive, irréductible à une formule rationnelle.
- ↑ Cette croyance à une corrélation directe entre les manifestations de la nature et les actes humains a été plus répandue qu’on ne pense chez les philosophies de l’antiquité. Dans la Chine ancienne, Ki-lse professe cette maxime : « Quand la vertu règne, la pluie vient à propos ; quand on rend les jugements équitables, le froid vient à son temps ». En Grèce, ce fait que les grandes écoles philosophiques ont discuté la divination, prouve combien les croyances religieuses d’une époque influent sur ceux mêmes qui se croient totalement émancipés.