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LE RAISONNEMENT INCONSCIENT

planter. Le plus souvent, cette phase larvaire se rapproche un peu de l’attrait sexuel ; mais sous l’influence de causes diverses — répugnances instinctives, habitudes et règles morales — il se produit une inhibition partielle ; il ne reste plus qu’un mouvement d’attraction autour duquel la nouvelle cristallisation s’opère peu à peu.

En ce qui concerne le mécanisme du raisonnement, conscient ou non, qui est au fond de ces transformations de sentiments, on peut préciser davantage. L’opération intellectuelle qui les soutient et les dirige est la pensée par analogie : forme inférieure adaptée à une logique inférieure. W. Stern qui, dans une bonne monographie, l’a étudiée en psychologue, dit avec raison « que ce processus négligé par les logiciens est le processus le plus ordinaire de beaucoup pour l’esprit humain »[1]. Aussi, il est naturel qu’il tienne une belle place dans la logique des sentiments qui, nous l’avons vu, est celle des primitifs.

Cet auteur distingue quatre catégories d’analogies : 1o externe, où les deux termes sont empruntés au monde des sens, exemple : appeler le chameau, le vaisseau du désert ; 2o interne, où les doux termes appartiennent à la vie intérieure, exemple : les analogies des sensations entre elles sons et couleurs ; 3o objective, où les événements du monde extérieur sont employés pour éclaircir et expliquer des états internes, exemple : l’emploi par

  1. Die Analogie im volkstümlichen Denken, Berlin, 1803.