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UNE GUERRE DE CENT ANS

la tête des troupes. Il choisit seulement quelques uns d’entre eux comme aide de camp, entre autres George Washington. Son dédain des coloniaux était extrême ; il le manifestait en toute occasion. Aussi commença-t-il par leur imposer plus d’un mois de manœuvres préliminaires qui les énervaient et les décourageaient. Puis la marche en avant commença ; elle dura cinq semaines. Braddock avait organisé son armée à l’européenne ; elle comprenait deux régiments anglais et à peu près 2.000 Virginiens et Pensylvaniens absolument déroutés par les moqueries de leurs nouveaux chefs et la discipline à laquelle on les soumettait. Le 9 juin 1755, Braddock tomba dans une embuscade. Non loin du fort Duquesne en pleine forêt, il fut attaqué par 230 Français et 637 Indiens commandés par MM. de Beaujeu, Dumas et de Ligneris. La bataille ne fut pas longue. Les Anglais furent en déroute en peu d’heures. Braddock se battit vaillamment mais tomba mortellement frappé. Washington se mit à la tête des Virginiens et couvrit la retraite en tenant bon tandis que les autres fuyaient. Vingt-six officiers et 714 soldats furent tués ; les Franco-indiens ne perdirent que 30 hommes. Presque en même temps l’américain Lyman, à la tête de ses coloniaux regagnait à Crown-Point, une bataille à moitié perdue par le général anglais Johnson. Ce dernier n’en reçut pas moins en récompense le titre de baronnet et une pension. Lyman n’eut rien. Dans ce combat périt le colonel Williams qui venait d’inscrire dans son testament un legs considérable destiné à fonder un collège pour l’Ouest du Massachusetts. Ce fut l’origine de Williams collège. Cette année là et la suivante, les échecs furent nombreux. Les Anglais s’en vengèrent en expulsant d’Acadie 7.000 Français qui paisiblement travaillaient la terre et vivaient heureux en donnant l’exemple de toutes les vertus privées. Ce fut moins leur nationalité que leur religion qui paraît avoir excité la rage des conquérants. Il y avait à ce moment-là comme une recrudescence de haine anti-catholique parmi eux. La première expédition dirigée contre Louisbourg avait revêtu le caractère d’une sorte de croisade. Un clergyman fanatique était parti en tête des troupes, une hachette à la main, pour jeter bas les images et les statues des saints dans les églises. Les Acadiens n’opposaient qu’une faible résistance à la domination anglaise mais ils étaient fort attachés à leur religion ce fut la cause de leur perte. Au plus fort de l’hiver on les embarqua brutalement sur des navires qui les disséminèrent tout le long des côtes au milieu de populations hostiles. On fit exprès de sépa-