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REVUE POUR LES FRANÇAIS

sation : elle est un événement d’une portée internationale. Elle marque une époque, celle où la République française commence à contempler son œuvre d’expansion avec une fierté légitime et découvre en son propre passé les meilleures garanties de son avenir. Son effort colonial est primordial, c’est par lui que notre pays s’est maintenu au rang des plus grandes puissances, c’est à son propos qu’il a fait, pendant les vingt dernières années, plus et mieux qu’aucun autre, il est sa gloire, il est sa force : voilà pourquoi nous devons tous applaudir au succès de l’entreprise qui en détermine le bilan en l’étalant orgueilleusement aux yeux du monde.

Si quantité de Français continuent d’en ignorer l’importance, en raison de l’abstention navrante des principaux journaux à la leur signaler, les étrangers l’ont appréciée à sa valeur. Les Allemands en particulier, si avides de s’instruire en cette matière où l’expérience leur fait défaut, ont beaucoup étudié l’Exposition de Marseille et les plus illustres de leurs « coloniaux » n’ont pas caché l’enthousiasme mêlé de surprise qu’ils en ont éprouvé. Tel le docteur Klotz déclarant à un grand journal d’outre-Rhin qu’il s’inclinait « avec envie » devant ce travail : « Nous avons trop souvent coutume, ajoutait-il, de considérer l’Angleterre comme l’apha et l’oméga en matière de colonisation, comme la puissance coloniale par excellence. C’est le plus beau titre de gloire de l’Exposition de Marseille de montrer pratiquement qu’en France on sait aussi coloniser et que nous autres Allemands nous pouvons encore apprendre énormément de la France si nous voulons seulement nous en donner la peine. »

Ce témoignage nous est précieux. Il me plaît de l’invoquer à l’appui de mes impressions personnelles : il les détend contre l’adage fameux « nul n’est prophète en son pays. »

En 1880, l’empire colonial français s’étendait sur environ 900.000 kilomètres carrés, peuplés par 8 millions d’habitants ; son commerce atteignait à peine 650 millions de francs. Aujourd’hui son domaine couvre 12 millions de kilomètres carrés, peuplés par 50 millions d’habitants ; son commerce dépasse un milliard 586 millions. La différence entre ces chiffres à vingt-cinq ans