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CE QUI SE PASSE DANS LE MONDE

de l’Union brésilienne une opinion peu flatteuse peut-être, mais malheureusement exacte. Matto Grosso occupe le centre du continent sud-américain et touche à la Bolivie. C’est un des États de la Confédération et comme tel il jouit d’une semi-indépendance dont il abuse au besoin. Au mois de mai dernier, une insurrection s’y organisa contre le pouvoir légal. Le 13 juin, l’armée révolutionnaire mit le siège devant la capitale Cuyaba où se trouvait enfermé le président de l’État. Ce dernier n’avait ni fortes murailles ni troupes nombreuses pour le protéger ; un assaut des assiégeants eut promptement mis fin à son pouvoir, mais dans la prison il tenait enfermé un grand nombre de prisonniers politiques dont quelques-uns appartenaient aux meilleures familles du pays. Il menaça de les mettre tous à mort si l’assaut était donné. Les révolutionnaires demeurèrent campés devant Cuyaba jusqu’au jour où ils se virent eux-mêmes menacés d’être pris à revers par un corps de troupes favorables au gouvernement. Alors ils entrèrent mais pas assez vite pour empêcher le tyranneau de faire passer au fil de l’épée, sans jugement, les malheureux otages qui lui avaient jusque-là servi de rempart. À leur tour, les vainqueurs s’étant saisis de la personne du président Paez le mirent à mort ; après quoi, ils s’installèrent au pouvoir. Ce qui est à retenir en cette affaire, c’est l’impuissance totale du gouvernement fédéral. Les forces qu’on a tenté d’envoyer à Matto Grosso ont eu toutes les peines du monde à s’en approcher, faute d’embarcations propres aux transports fluviaux ; mais ce qui est plus incroyable c’est qu’en réponse à un message présidentiel, par lequel le chef de la République du Brésil suggérait que les coupables fussent cités devant la justice fédérale, le Sénat de Rio de Janeiro ait paru incliner du côté de l’abstention ; la commission compétente a conclu en effet que, si regrettable que fussent ces événements, ils ne nécessitaient pas une intervention fédérale. Voilà qui n’est pas ordinaire. Le Brésil devrait changer de titre : celui d’États-Désunis lui conviendrait mieux.

Visites scandinaves.

Frédéric viii a apporté un grand tact et passablement de courage dans son geste initial. Il était impossible de mieux inaugurer son règne qu’il ne l’a fait en se rendant avant tout à Stockholm