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SUR L’HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION

trouvée établie en France la République démocratique, parce que, ce jour-là, personne n’a plus discuté sérieusement les résultats acquis de la Révolution, l’auteur indique le but que se propose l’école scientifique dont il est le chef infiniment modeste et très méritant. Ladite école « veut surtout mettre en lumière les faits importants — parfois non célèbres — qui ont influé sur l’évolution générale de la France nouvelle, ou, par contre-coup, sur l’évolution générale de l’humanité. » « Nos prédécesseurs, ajoute-t-il, voyaient la France menée par quelques hommes d’élite, agissant sur la scène de Paris, dans une lumière noble. Nous voyons la Révolution conduite par le peuple français spontanément organisé en groupes locaux dans toutes les communes, et il nous semble que presque toutes les grandes influences aient été anonymes. Avant nous, on étudiait surtout ce qui était rare, étrange, anormal. Nous étudions surtout les développements normaux de la vie sociale et politique d’alors, d’où est sortie obscurément et lentement la France actuelle. »

Quant à la méthode, l’école scientifique, par opposition à l’école littéraire qui la précéda, n’use des Mémoires qu’avec la plus grande précaution ; elle leur préfère « systématiquement les témoignages vraiment contemporains, les correspondances, les notes prises sur l’heure en forme de journaux particuliers, les journaux publics ou gazettes, où il y a certes de la passion, de l’erreur, mais où les expressions et la réalité sont sinon adéquates, du moins concomitantes. » Elle contrôle le Moniteur par d’autres journaux, notamment par le Journal des Débats et des Décrets, et prend pour base le procès-verbal officiel des assemblées. Elle étudie les lois dans leur texte authentique. En somme, comme on le voit, la méthode n’a en elle même rien d’original ni d’inattendu ; elle est fort connue, et depuis longtemps ; aussi bien M. Aulard en est-il le premier convaincu, mais l’originalité résidait dans la possibilité d’appliquer les règles de la critique moderne à l’étude d’une époque où les historiens n’avaient jusqu’ici porté leurs recherches qu’avec un esprit prévenu d’avance, les uns pour y trouver des arguments contre la démocratie qu’ils « abhorraient, comme Taine, les autres comme Louis Blanc et Michelet, pour réfuter la thèse politique et sociale des conservateurs. »

Mais arrivons à la partie la plus vivante et la plus intéressante de l’article de M. Aulard, celle où il expose les résultats actuellement acquis des recherches entreprises suivant sa méthode. Au