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REVUE POUR LES FRANÇAIS

étude a maintes fois constaté, au cours de ses voyages en pays musulman, le rôle primordial des instituteurs étrangers. L’indigène qui sait un peu de français se réclame volontiers de la France ; il s’enorgueillit de favoriser nos entreprises ; il accueille avec sympathie tout Français de passage, il est fier de le guider et de le protéger. Plus nos écoles seront nombreuses, et plus nous augmenterons le chiffre de nos partisans. À cet égard, nous sommes très pauvres au Maroc. L’Alliance israélite universelle, remarquablement dirigée et dans un esprit très français, nous assure une importante clientèle de Juifs, mais sa propagande n’atteint pas les musulmans.

Ajoutez à ces exigences de notre action politique, morale et intellectuelle, la nécessité d’installer de nouveaux consuls, d’augmenter leurs moyens d’influence en les rétribuant davantage, de les préparer à leur tâche et de former à côté d’eux des collaborateurs capables, et vous aurez compris la difficulté du problème. Vous vous souviendrez que le Parlement français, votre mandataire, après s’être rallié sagement au programme de pénétration pacifique qui en implique la solution, a jugé suffisant d’y consacrer une somme annuelle de 310.000 francs. Vous sourirez de ce chiffre infime et vous cesserez de vous étonner si la France n’occupe pas au Maroc la position prépondérante que vous souhaitez.

Il nous reste à parler de notre pénétration économique et commerciale. Les facultés d’achat d’un pays neuf sont naturellement restreintes. Pour que le Maroc devienne un bon client de notre commerce, il fallait donc faciliter sa mise en exploitation. Sans parler ici de la police, indispensable à la sécurité des biens et des personnes, il fallait y introduire des capitaux et y créer des voies d’accès.

Les établissements financiers français ont officiellement prêté au Maroc 65 millions de francs. Joignez-y la valeur des immeubles et des entreprises commerciales et industrielles que possèdent nos compatriotes : vous atteindrez le chiffre de 100 millions, six fois supérieur à celui des placements allemands.

À tort ou à raison, — nous ne le discuterons pas ici, — la France ne s’est pas décidée à relier l’Algérie au Maroc par un chemin de fer qui eût constitué une voie de pénétration exclusivement fran-