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ANALYSES. — t. mamiani.La religione dell’avvenire.

1° La nécessité de savoir d’où vient l’homme et où il va ;

2° L’élan naturel de l’âme vers l’infini et l’absolu ;

3° L’étroite parenté de la religion avec la morale.

Voilà le sens religieux justifié au point de vue de la pratique. Théoriquement, il se justifie ainsi : Il y a trois sortes de vérités ; les unes évidentes par fait ou par démonstration, à savoir celles qui sont du ressort de la science ; d’autres devenues évidentes par le témoignage ou le sens commun ; d’autres enfin qu’on peut regarder comme révélées par l’intuition sublime des grands penseurs, et qui sont des aperçus sur l’origine et là nature des choses, sur l’essence et l’existence de Dieu, sur la destinée de l’homme et du monde, etc. La faculté d’où elles émanent est naturelle, cela va de soi, et elles n’ont rien de commun avec les révélations prétendues positives ; ce sont des anticipations, des divinations de l’esprit, qui, par instants et dans de certaines conditions, arrive à prendre une conscience plus profonde et plus adéquate de sa nature. C’est là ce qui fait vivre toutes les religions et ce qui devra exclusivement constituer la religion naturelle que M. Mamiani entreprend d’instaurer.

Quel sera donc le contenu de cette religion ? D’abord l’acte religieux par excellence, l’adoration, implique trois conditions : 1° la présence intérieure d’un objet suprême d’intuition ; 2° la croyance à l’existence de cet objet, ou foi ; 3° la vénération et l’amour dudit objet, c’est-à-dire l’adoration elle-même.

Par là, nous sommes amenés à définir la religion : « le lien le plus intime qui nous unisse à l’Absolu, et l’appréhension la plus vive, la plus efficace et la plus complète que nous puissions faire de lui. » L’évolution religieuse n’a même pas d’autre but ni d’autre effet que d’élucider les rapports qui nous rattachent à l’absolu.

Voilà une définition qui s’éloigne singulièrement de celle que nous présentait M. de Hartmann et qui nous rejette en pleine ontologie. En réalité, nous n’en étions guère sortis.

Il convient donc d’admettre, non pas comme article de foi, mais à titre de fait scientifique et expérimental, l’existence d’un troisième ordre de vérités, qui nous sont révélées dans l’intuition naturelle de la conscience religieuse. Le critérium de M. Mamiani diffère ainsi essentiellement du critérium des orthodoxes —, car il admet que la nature humaine est capable par elle-même, et non par communication transcendante, de pénétrer la vérité métaphysique. Il n’abaisse point Dieu à la portée de l’homme ; il élève l’homme au niveau de Dieu.

Les vérités éternelles ainsi révélées, auxquelles M. Mamiani n’hésite pas à donner le nom de « voix du Verbe », portent plusieurs caractères qui suffisent à les faire reconnaître. Elles s’imposent en toute évidence par leur grandeur et leur beauté ; elles accroissent la dignité et la perfection de la nature humaine, et sont ainsi une preuve de la fécondité et de l’efficacité du bien; enfin elles concordent entre elles et ne contredisent à aucun principe de bon sens ni à aucune vérité expérimentale.