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vrages que l’auteur étudie, tout ce qui pouvait être supprimé sans nuire à la clarté est en effet supprimé. Tout ce qui reste est nécessaire. Comment résumer un pareil résumé ? Nous n’avons qu’une seule ressource : faire connaître la méthode de l’auteur et la nature de ses jugements.

Il faut se défier des analyses d’ouvrages philosophiques. Les meilleures analyses qui existent sont très claires pour ceux qui ont lu les ouvrages analysés ; pour les autres, elles sont à peu près sans utilité. Il nous semble que M, Ribot est pénétré de cette observation. Sa méthode n’est pas celle de tous les auteurs d’analyses : elle est plus naturelle et plus vive ; elle consiste à choisir parmi les questions traitées par l’auteur qu’il étudie les principales et à les examiner lui-même à fond. Cet examen est toujours terminé par un jugement. précis qui résume les résultats définitivement acquis. Dans ces jugements, M. Ribot se montre d’une extrême réserve. Il pratique à la lettre ce précepte cartésien : n’admettre pour vrai que ce qui paraît évidemment être tel.

Une étude sur Herbart et son école était le point de départ nécessaire. La philosophie de Herbart est en effet l’origine historique du grand mouvement philosophique auquel M. Ribot a consacré tout son travail. Certes, par son caractère scientifique, la philosophie de Herbart était faite pour le séduire. Il la juge pourtant avec une grande liberté d’esprit. Il ne va pas sans doute jusqu’à dire, comme Fortlage : « la psychologie mathématique est un divertissement ingénieux sur des grandeurs imaginaires ; » mais, avant de s’approprier le jugement favorable de Volkmann von Volkmar, il fait des réserves, comme celleci : « Le point de départ de Herbart est certainement hypothétique (p. 28)… le défaut commun des hypothèses de Herbart est d’être bien rarement appuyé sur l’expérience et préparé par une induction préalable. Quant à la vérification expérimentale des résultats, elle manque complètement (p. 29-30.)… En admettant, ce qui est possible sans que rien le prouve, que le calcul puisse s’appliquer un jour à la psychologie comme il s’applique à la physique, il est certain que cette phase dernière de la science ne pourra être atteinte que si, par des réductions successives, on a pu ramener préalablement la psychologie à la biologie, celle-ci à des sciences de moins en moins complexes et finalement à la mécanique (p. 30, 31). »

Avec Lotze et la théorie des signes locaux, M. Ribot commence une étude qu’il conduit avec une véritable supériorité. Elle a pour objet l’origine de la notion d’espace. Tous les faits essentiels sont indiqués, toutes les expériences discutées, toutes les hypothèses pesées et ramenées à leur juste valeur. Il est difficile de désirer un exposé plus complet de ce qu’on appelle l’état de la question. Et pourtant nous devons protester contre une omission qui nous paraît presque toucher à l’injustice. Tout en se renfermant dans la psychologie allemande, M. Ribot ne laisse pas échapper l’occasion de citer des Anglais, comme