Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome IX, 1880.djvu/17

Cette page n’a pas encore été corrigée
7
espinas. — le sens de la couleur

destinées sont inséparables, c’est ce que donne à penser l’étude des terrains. « Les plus anciennes fleurs entomophiles appartenaient probablement au groupe des dicotylédonées , qui maintenant montre la plus haute différenciation ; mais elles consistaient en pétales séparées, comme la rose sauvage, au lieu d’être tubulaires ou en forme de clochette, comme le chèvrefeuille ou la campanule. Peu à peu cependant les divers pétales devinrent en certains cas adnates, c’est-à-dire se développèrent ensemble de manière à former une seule corolle dentelée. La première de ces deux classes de fleurs est connue sous le nom de polypétale, l’autre sous celui de gamopétale. À une date plus récente encore parurent les fleurs irrégulières, comme les labiées et les orchidées, qui sont spécialement adaptées en vue de la visite des insectes ; et sous nos yeux, à cette heure, le processus de différenciation se produit sans aucun doute partout où une abeille visite une fleur dans les jardins de nos maisons. Parallèlement à cette différenciation des diverses fleurs se produisit la différenciation des insectes chercheurs de fleurs. Même dans le monde carbonifère quelques espèces errantes de cette grande classe vivaient déjà dans la broussaille dure et siliceuse ; mais Lubbock croit que les Hyménoptères, les Hémiptères et les Diptères commencèrent à exister pendant la période crétacée, tandis que les Lépidoptères ou papillons n’apparurent qu’aux temps tertiaires. Les Coléoptères n’offrent des vestiges probants d’alimentation par les fleurs que durant l’époque miocène. Quant aux abeilles , elles représentent probablement les membres les plus récents et les plus différenciés de toute la classe, et elles ne peuvent guère avoir atteint leur forme présente qu’à une période relativement rapprochée de nous. » Les fleurs gamopétales n’ont pas pu évidemment se développer avant les insectes munis d’une trompe spécialement adaptée pour leur fécondation.

Ainsi non seulement la richesse de tons et le parfum des fleurs sont le produit des insectes, mais encore les destinées prospères faites aux plantes qui les portent, grâce au privilège de la fécondation croisée, sont dues à leur intervention. Ce sont eux qui ont donné à notre globe l’aspect qu’il a maintenant, car, sans eux, il n’est pas sûr que les espèces végétales supérieures auraient pu se constituer ; en tout cas, sans eux, elles n’auraient pas su se répandre et envahir la plus grande part des continents.

Les vertébrés leur ont rendu un service analogue, en se chargeant de développer les fruits. Quand ce phénomène s’est produit, la surface de la planète avait à peu près le même aspect qu’à présent : c’était pendant la période tertiaire. Une flore et une faune voisines