Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome IX, 1880.djvu/119

Cette page n’a pas encore été corrigée
109
analyses. — a. macfarlane. Principles of the algebra.

différence formelle entre le raisonnement par syllogisme et le raisonnement mathématique et conduire ainsi à la constitution d’une logique algébrique… Est-ce sur cette vue que repose la logique algébrique de Boole ? Ce serait singulièrement rapetisser son œuvre, que de le croire. Une logique mathématique établie sur ces principes ne serait au fond qu’une notation symbolique de la logique ancienne… Boole a voulu au contraire élargir le champ et accroître la puissance de la logique déductive… Qu’est au fond l’opération déductive ? C’est l’élimination d’un terme moyen dans un système de trois termes. Boole, guidé par son instinct de mathématicien, généralise le problème et le pose de la façon suivante : Étant donné un système d’un nombre quelconque de termes, en éliminer autant de moyens termes qu’on voudra et déterminer toutes les relations impliquées par les prémisses entre les éléments qu’on désire retenir ; ou encore : Étant données certaines conditions logiques, déterminer la description d’une classe quelconque d’objets sous ces conditions… On a comparé, dans ces derniers temps, l’œuvre de Boole en logique à celle de Descartes en géométrie. La comparaison ne manque pas d’exactitude ; mais, s’il a été conduit à appliquer l’algèbre à la logique, de môme que Descartes l’avait appliquée à la géométrie, c’est qu’il a transformé en le généralisant le problème de l’inférence déductive par une vue d’ensemble comparable à celle du mathématicien qui, le premier, conçut la pensée d’une théorie générale pour la solution des équations[1]. »

Comment comprendre qu’une conception si vaste, si philosophique ne se soit pas d’abord imposée à l’attention de tous, qu’elle ait excité et qu’elle excite encore plus de défiances que de controverses ? Ce fait s’explique-t-il seulement par l’aversion insurmontable d’une partie du public philosophique pour la langue et les symboles mathématiques ? On ne peut certes douter que cette aversion ne soit très forte même en Angleterre dans la partie de la nouvelle logique. Lorsque M. J. Venn publia en 1866 la première édition de sa Logique du hasard, il craignit que sa qualité d’homme de Cambridge ne fût une mauvaise recommandation pour son livre ; il prit soin de déclarer dès les premières lignes de sa préface que, si quelques formules d’algèbre se trouvaient par hasard dans son ouvrage, elles ne faisaient nullement une partie essentielle de ses déductions, et que pour lire son livre les seules connaissances mathématiques nécessaires étaient celle des quatre règles de l’arithmétique. Un tel fait est significatif, et la haine des mathématiques peut expliquer bien des choses. Mais les préventions contre la logique de Boole tiennent à d’autres causes encore. M. Macfarlane en a discerné deux principales qu’il combat avec une rare habileté.

Et d’abord bien des personnes sont convaincues que le symbolisme de Boole est une fantaisie mathématique absolument nouvelle et sans aucun lien avec les méthodes d’exposition logique dont une longue

  1. Liard, Les logiciens anglais, p. 200 et suiv.