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pandit Râma-Nârâyana-Vidyâratna, qui la termina en 1863. Indépendamment du commentaire de Çankara, elle comprend un commentaire de ce commentaire par Râma-Ananda-Sarasvatî et non pas, d’après M. Hall, par Govinda-Ananda, comme l’a indiqué par erreur M. Röer.

Il est regrettable qu’on n’ait encore aucune traduction complète des Vedânta-sûtras dans les langues européennes. M. Ballantyne, du collège de Bénarès, en commença bien une version anglaise en 1851, mais elle ne paraît pas avoir été poussée au-delà des trente premiers sûtras ; et c’est également le point où en est celle dont le Révérend Banerjea entreprit en 1870 la publication dans la Bibliotheca indica. Tant que ces travaux ne seront pas achevés, les Vedântas-sûtras ne seront profitables qu’aux rares indianistes qui sont assez familiarisés avec le style des Sûtras et des commentaires et les matières difficiles dont ils traitent pour en débrouiller le sens exact.


§ 3. — Les œuvres de Çankara.

De tous les théologiens de l’Inde dont le nom corresponde à une individualité sûrement historique, Çankara est le plus célèbre par le mérite de ses ouvrages, leur grand nombre, la gloire qu’il s’est acquise parmi ses compatriotes et la popularité des légendes qui se rapportent à sa personne. La littérature sanscrite possède différentes biographies où sa vie est retracée avec des détails plus ou moins fabuleux et sa renommée s’étendit même jusqu’en Perse, puisqu’une légende de ce pays relate que, vaincu par Zoroastre dans un tournoi théologique, il se convertit au magisme à la suite de cette défaite avec 80,000 brahmânes. Ce serait pourtant avoir d’étranges illusions sur la manière dont on écrivait l’histoire dans l’Inde, de s’imaginer que les biographes de Çankara ont pris le soin, élémentaire en Occident, de nous apprendre la date de sa naissance, ou du moins l’époque où il vivait. Ce n’est qu’au prix de laborieuses recherches et à l’aide d’inductions de différentes sortes que les savants d’Europe en sont arrivés généralement à fixer le temps de son existence du viiie au ixe siècle de notre ère.

À en juger par les ouvrages qui nous ont été transmis sous son nom et par le prosélytisme ardent et infatigable auquel sa vie fut consacrée d’après les biographies dont nous venons de parler, Çankara a poursuivi le triple but de vulgariser la doctrine du Vedânta, d’en coordonner les principes sous une forme plus généralement