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lachelier. — théorie du syllogisme.

nous avons fait tout à l’heure sur l’universelle affirmative, quoique la négation d’une condition qui est elle-même négative, prenne, dans la mineure, la forme d’une affirmation. Mais, tandis que la contraposition de l’universelle affirmative en modifie la qualité et y introduit un terme indéfini, celle de l’universelle négative aboutit à la transposition pure et simple des termes de la proposition primitive ; et Aristote lui a donné, à cause de ce résultat, le nom de conversion, qu’elle porte encore aujourd’hui.

Revenons encore à notre universelle affirmative, mais considérons-la, cette fois, comme l’expression d’un fait : Tout A est B, en d’autres termes, chacun des sujets réels, x, y, z, qui possèdent l’attribut A, possède aussi l’attribut B. Il est clair que nous ne pouvons pas appliquer ce fait, comme une loi, à un autre fait, et que, par conséquent, nous n’en pouvons, en ce sens, rien conclure : mais nous pouvons, si nous voulons absolument sortir de la proposition donnée, renverser l’expression de ce fait lui-même et l’énoncer sous cette forme : quelque B est A. D’une part, en effet, nous ne donnons aux sujets, x, y, z, le nom de A, que parce qu’ils possèdent l’attribut A ; de l’autre, nous affirmons que ces mêmes sujets possèdent l’attribut B : nous pouvons donc également les désigner par le nom de ce dernier attribut, et en affirmer ensuite explicitement l’attribut A. Seulement, tandis que nous les appelions tout à l’heure « tout A », nous ne les appellerons maintenant que « quelque B » : car nous ne savons pas si l’attribut B n’appartient pas encore à d’autres sujets, s, t, u, dans lesquels il ne coïncide plus avec l’attribut A. Mais cette opération, qui n’est autre que la conversion de l’universelle affirmative, est un véritable syllogisme de la troisième figure, en Darapti :

Tout A est A :
or tout A est B :
donc quelque B est A.


Dans les syllogismes précédents, c’était un attribut, A ou B, qui servait de moyen terme entre un sujet réel, x, et un autre attribut : ici ce sont, au contraire, les sujets réels, x, y, z, qui sont le moyen terme sans lequel il nous serait impossible de passer de la notion B à la notion A. Nous savons bien, en effet, par la proposition donnée, que B est une condition de A : mais nous n’avons aucune raison de supposer que cette condition soit la seule : et, de ce que A implique B, il nous est impossible de conclure que B, à son tour, implique A. C’est une question de fait, de savoir si B coexiste quelque part avec les autres conditions de A ; et cette question ne peut être résolue que par l’existence d’un ou plusieurs sujets, x, y, z, qui, à la pos-