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qu’il croit nécessaires ou favorables au progrès des sciences de la nature : notre analyse aura surtout pour objet de les faire ressortir.

L’introduction très-étendue demande un examen spécial. M. Zöllner y déclare que l’exposé et l’appréciation des travaux d’Olbers et de Bessel sur les comètes sont plutôt le prétexte que l’objet véritable de son livre. Comparant ces travaux trop peu cités aux théories de Herschell, de M. Faye, surtout de Tyndall sur le même sujet, le professeur de Leipzig affirme sans hésiter l’infériorité des secondes. Il va même jusqu’à dire qu’on rencontre des vues « beaucoup plus rationnelles » et même une théorie physique des comètes beaucoup plus parfaite dans les vieux écrits de Képler, au xvie siècle.

M. Zöllner se demande la cause de la médiocrité qu’il croit découvrir dans les conceptions de la plupart des physiciens sur les comètes. « J’ai trouvé, dit-il, que les représentants actuels des sciences exactes n’ont pas en général une claire conscience des premiers principes de la théorie de la connaissance. » Le nombre toujours croissant de leurs observations, l’usage purement et exclusivement empirique qu’ils en font ont eu pour résultat d’appauvrir et de corrompre en eux « la faculté d’appliquer avec conscience la loi de la causalité à la combinaison et à la sage interprétation des données de l’expérience. »

Il est si commode d’ailleurs de conquérir aujourd’hui la notoriété scientifique ! Avec de bons instruments, de la patience et du temps, on est bien malheureux, si l’on ne réussit pas à découvrir quelque fait ignoré. Et la moindre découverte suffit à illustrer le nom de son auteur, et à lui ouvrir l’accès des universités, pour peu qu’il ait un certain art du monde et l’habileté pratique, qui sait donner du lustre aux inventions les plus médiocres.

Cependant cette science tout empirique et les réputations suspectes qu’elle soutient semblent perdre de plus en plus dans l’opinion : une réaction énergique se prépare. Helmholtz, avec bien d’autres, mais plus efficacement peut-être qu’eux tous, s’est attaché à remettre en honneur le nom et les idées de Kant, même auprès des savants de métier.

Le secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences de Berlin, Du Bois-Reymond témoignait assez, par le discours solennel qu’il prononçait le 7 juillet 1870, « sur l’influence des idées de Leibniz dans la science moderne, » que l’esprit positif n’est plus le maître exclusif des intelligences scientifiques. On s’en convainc aisément par la lecture des passages suivants de ce discours : « La physiologie est, à la vérité, la science des conditions indispensables à l’exercice de la conscience ; mais il est facile de montrer qu’elle ne peut réussir à en expliquer seulement les premières manifestations, comme le plaisir et la peine. » — La théorie darwinienne rend compte par l’hérédité de l’apparition de bien des dispositions physiques et intellectuelles ; « ne pourrait-on pas croire que les idées prétendues innées ne sont, à leur tour, qu’un héritage naturel de notre espèce ? La doctrine de Leibniz s’accorde ici