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fois par les esthéticiens antérieurs des diverses écoles. Fr. de Schlégel, Jean-Paul, en avaient fait une étude attentive dans leurs écrits ; mais leur théorie avait laissé beaucoup à désirer et par le manque de clarté et par le caractère étroit ou exclusif du principe qui avait suggéré la solution. Dans la philosophie hégélienne, ce problème avait été posé et agité de nouveau. L’Esthétique de Weisse contient sur ce sujet un chapitre important. Quant à Hegel, c’est en passant qu’il l’aborde. S’il en parle, c’est d’une façon fort laconique à propos d’autres sujets, en particulier de l’humour et de la comédie (première et troisième partie). La question était donc loin d’être épuisée et résolue d’une façon satisfaisante. A. Ruge la pose de nouveau. Il s’efforce de lui donner une solution meilleure, surtout plus scientifique en appliquant la méthode qui doit présider au système entier, d’une façon plus exacte et plus rigoureuse. A-t-il réussi au gré des partisans de cette méthode ? Nous n’avons pas à l’examiner, pas plus qu’à juger le fond même de sa théorie. Bornons-nous à donner une idée du plan et du mérite du livre. Il est intitulé Nouvelle introduction générale à l’Esthétique et Théorie du comique. L’introduction en contient les trois quarts. Ce qui peut la justifier c’est que, dans un système comme celui-ci et avec l’emploi d’une telle méthode, une des parties du tout ne peut se comprendre sans les autres. Le comique étant un des moments de l’idée du beau, pour en déterminer la nature, il faut passer par les moments antérieurs du beau, du sublime et du laid, ce qui revient à retracer l’esquisse de la science entière. L’intervalle principal à franchir est le laid qui se retrouve en effet dans le comique. Celui-ci le surmonte, l’efface par son retour au beau, où apparaît le triomphe de l’idée. Nous ne voulons pas davantage entrer dans cette théorie. Pour montrer ce qu’elle a d’original et de neuf dans le système hégélien, il nous faudrait plus d’espace. Encore moins essaierons-nous de faire voir en quoi et par où elle diffère des anciennes théories du comique dont la première et la seule bien connue est celle d’Aristote. Quant à la forme du livre et aux détails, quoique rédigé en général avec trop de laconisme et accusant trop la rigueur du langage propre à l’école et à ses formules, il offre un réel intérêt. Outre qu’il a le mérite d’agiter et d’approfondir une question difficile, il est plein d’observations fines et judicieuses. L’auteur y fait preuve non-seulement de sagacité par ses critiques ; mais il complète avantageusement sur bien des points, les analyses délicates, mais subtiles de Jean-Paul. Lui-même est-il exempt de subtilité ? Ce serait trop exiger de l’emploi d’une telle méthode de la part d’un esprit qui n’est pas connu pour avoir toujours pratiqué la mesure dans ses autres écrits. Mais son traité n’est pas sans valeur philosophique. Ce