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de la science, soit sur des points particuliers, accusent chez les auteurs beaucoup d’indépendance et une véritable originalité. Tout en adoptant le principe et la méthode du maître, chacun a sa manière et ses opinions distinctes. Aucun ne s’est asservi à sa pensée. La plupart même se sont montrés très-sévères à son égard. Ils ont reconnu ce qu’il y avait d’imparfait ou de défectueux dans cette partie de son système ; ils ont signalé les lacunes et les défauts dans l’ensemble et les détails. Quelques-uns ont fait cette critique avec une rigueur qui pourrait paraître injuste, si l’amour de la vérité et l’intérêt scientifique qui doivent passer avant tout, n’étaient une excuse suffisante. Chose qui paraîtra singulière ! ce que surtout ils lui reprochent, c’est de n’avoir pas été fidèle à sa propre méthode, de l’avoir ici presque abandonnée et de n’avoir pas fait produire à sa dialectique l’œuvre scientifique et philosophique qu’on en devait attendre. Aussi chacun s’est remis au travail en ce sens, et tout en gardant la pensée fondamentale, a essayé soit de refaire le système entier, soit d’appliquer à des questions spéciales une méthode plus correcte et plus rigoureuse.

Ne pouvant les suivre sur ce terrain nous devons nous borner à signaler le caractère général de ces écrits.

Avant d’en venir aux vrais disciples et aux successeurs directs, nous avons d’abord affaire à un penseur distingué qui est un des représentants principaux d’une secte dissidente et dont l’esthétique est regardée par les connaisseurs comme une des œuvres capitales de cette science. Christian Weisse appartient à cette classe de philosophes allemands qui, n’ayant pas la prétention de fonder, par eux-mêmes, une véritable école, ne se laissent pas non plus enrôler dans celle qui domine, se tiennent à l’écart, n’acceptant qu’avec de grandes réserves le principe et la méthode du chef de cette école et lui faisant subir une modification qui en change la nature et la portée. Ce qui le caractérise et le distingue est que tout en admettant le principe hégélien de l’idée et la dialectique hégélienne, qui ne fait qu’un avec le système, il restreint la portée de cette méthode et lui refuse le pouvoir de s’élever jusqu’aux vérités les plus hautes de la métaphysique, de la science elle-même et de la religion. Pour lui, ces vérités, l’existence d’un Dieu personnel et libre, la providence, l’âme individuelle de l’homme, sa spiritualité et son immortalité, forment un ensemble auquel la logique la plus transcendante ne peut atteindre ; elles dépassent les limites de la dialectique et doivent être considérées comme l’objet d’une connaissance suprême dont le procédé plus direct est l’intuition. Le sentiment immédiat ou la foi seuls nous les révèlent. Par là il se rapproche plutôt de Schelling ou de Jacobi. Il fonde une sorte