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dialectique puissante et nouvelle dont il use dans l’examen critique des opinions d’autrui : « Pomponazzi excelle à mettre en présence les thèses opposées, à les défendre et à les attaquer avec une égale force, à les concilier dans une thèse plus compréhensive. Les théories déjà exprimées par d’autres prennent chez lui une valeur toute nouvelle à cause des raisons qu’il donne pour les appuyer. » M. Fiorentino, esprit dogmatique, le louait surtout pour sa doctrine ; M. Ferri, esprit critique, le loue surtout pour sa méthode.

Toutes ces assertions trouvent des preuves dans le manuscrit de la bibliothèque Angelica, dont M. Ferri présente à la fin de son mémoire des extraits fort étendus. Ce commentaire est une source fort précieuse à tous égards. M. Fiorentino, dans un appendice à son volume, signalait bien l’existence, à la Magliabechiana de Florence, d’un manuscrit intitulé : « Quœstiones animasticœ Mag. Pétri Pomponatii ; » mais ce traité incomplet et mutilé est de mince importance. Les recherches faites par M. Ferri lui ont permis d’établir d’une manière indiscutable que le manuscrit de Rome contient l’ensemble des leçons professées à Bologne en 1520. La question de date a ici un haut intérêt ; car on devra chercher à vérifier la théorie de M. Fiorentino qui soutient que Pomponazzi, partisan de la spiritualité relative de l’âme dans le Traité de l’immortalité en 1516 ; irrésolu en 1518 dans l’Apologie, se prononçait enfin pour l’absolue matérialité dans le De Nutritione. Le commentaire sur le De Anima est de l’époque de maturité où Pomponace a pu le mieux entrer dans la pleine conscience de sa pensée : on pourra sûrement en appeler à ce document comme à un témoignage pour juger toutes les hypothèses.

Ce commentaire apporte en outre un élément tout nouveau dans l’étude de la philosophie de Pomponace : nous l’avons dit, les ouvrages dans lesquels M. Fiorentino avait cherché la théorie de l’âme, laissaient certaines parties de la psychologie dans l’ombre ; toute la lumière se concentrait sur un ou deux points qui devenaient le centre delà polémique. Or, ce ne sont pas toujours les théories les plus importantes d’un système qui soulèvent les plus vives discussions ; ce sont plutôt celles qui touchent aux croyances, aux intérêts, aux préjugés de l’époque. Ainsi en était-il advenu du système de Pomponace. Pour peu qu’on lise attentivement son œuvre, on restera convaincu que l’objet réel de sa philosophie, le terme de sa pensée n’est nullement l’établissement de telle ou telle thèse, surtout d’une thèse négative. La théorie de la mortalité n’est qu’une conséquence de ses idées sur l’âme. Pour pouvoir conclure sur la destinée de l’esprit, Pomponace a dû en étudier la nature. Mais le Traité de l’immortalitè suppose sa psychologie plutôt qu’il ne l’expose. Or, ce qui