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réelle et de l’attitude de l’observation intérieure en psychologie.

Il est vrai que ce qui a grandement contribué à cette confusion d’idées, c’est la vieille école des psychologues, qui s’étaient bornés à la seule observation, imitant cet astronome qui avait rejeté toutes les lunettes d’approche, croyant qu’il pourrait étudier les étoiles à l’œil nu. Qu’y a-t-il d’étonnant qu’il se soit trouvé dans ces circonstances des savants qui condamnèrent totalement l’expérience intérieure, sans penser que leurs recherches, toutes basées qu’elles fussent sur la physiologie ou sur l’ethnographie, seraient, en qualité de recherches psychologiques, complètement impossibles, sans le contrôle de cet agent intérieur, et que la psychologie en général n’aurait, sans lui, aucune valeur scientifique ? Contrairement donc à l’opinion énoncée par M. Stewart, nous nous hasardons à soutenir que la psychologie est une science, que son objet se laisse exactement séparer de celui des autres, ou que le moyen qui nous est indispensable pour parvenir à la connaissance de cet objet diffère complètement de celui que nous employons pour connaître l’objet des autres sciences. Elle possède aussi ses particularités, sa méthode et son but à part.

C’est donc commettre une confusion d’idées qu’il faut absolument tâcher d’éviter, que de ne point distinguer la psychologie des sciences naturelles ainsi que de l’ethnologie ou de la Culturgeschichte. On ne parviendra cependant à s’en défaire qu’en restituant à l’observation intérieure la place qui lui est due en psychologie, sans se borner pour cela uniquement à elle, et sans ignorer tous les autres moyens de recherche, mais en la considérant comme celui par l’emploi duquel les autres moyens acquièrent aussi leur valeur réelle. Il convient également, une fois pour toutes, d’abandonner l’ancienne division en psychologie empirique et en psychologie spéculative : la première se servait exclusivement de l’expérience intérieure, tandis que l’autre, amas de spéculations contradictoires sur l’âme, était basée sur des prémisses métaphysiques acceptées à priori. La psychologie scientifique n’est et ne peut être qu’une. L’objet de ses recherches, ce sont les phénomènes de la vie psychique de l’individu, dont l’existence et les propriétés nous seraient inconnues sans notre propre conscience intérieure. — La psychologie emploie les moyens les plus divers et profite de tous les matériaux que peuvent seulement lui fournir les autres sciences. Elle étudie et approfondit le rapport qu’il y a entre les processus extérieurs et les processus intérieurs, elle examine leur dépendance mutuelle pour connaître l’origine de ces derniers, et elle considère les lois dont dépendent les changements qui ont lieu dans leur qualité et leur force. Elle compare les phénomènes de la vie psychique chez les