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liard. — la logique algébrique de boole

où entrent au moins trois prémisses, est une chaîne de syllogismes, où la conclusion du premier argument devient la majeure du second, et ainsi de suite, jusqu’à la conclusion finale.

Mais, qu’est au fond l’opération déductive ? C’est l’élimination d’un terme moyen dans un système de trois termes. Boole, guidé par son instinct de mathématicien, généralise le problème et le pose de la façon suivante : Étant donné un système d’un nombre quelconque de termes, en éliminer autant de moyens termes qu’on voudra, et déterminer toutes les relations impliquées par les prémisses entre les éléments qu’on désire retenir ; ou encore : étant données certaines conditions logiques, déterminer la description d’une classe quelconque d’objets sous ces conditions.

Là est la conception originale, l’idée nouvelle qui, si elle est vraie, doit changer la face de la logique. On comprend en effet que, si le problème ainsi posé en termes généraux est résoluble, le syllogisme des anciens, avec ses annexes, qui a été jusqu’ici, toute la logique, n’en est, en fin de compte, qu’un cas particulier, de même que l’élimination d’un symbole de quantité entre deux équations données n’est, en algèbre, qu’un cas particulier de la théorie générale de l’élimination. On a comparé, dans ces derniers temps, l’œuvre de Boole, en logique, à celle de Descartes, en géométrie. La comparaison ne manque pas d’exactitude, comme nous le verrous plus loin ; mais s’il a été conduit à appliquer l’algèbre à la logique, de même que Descartes l’avait appliquée à la géométrie, c’est qu’il a transformé, en le généralisant, le problème de l’inférence déductive, par une vue d’ensemble comparable à celle du mathématicien qui, le premier, conçut la pensée d’une théorie générale pour la solution des équations.

On conçoit aisément que pour résoudre le problème général de la logique, dans les termes où Boole l’a posé, il serait chimérique d’attendre aucun secours de l’analytique péripatéticienne ; celle-ci demeure confinée dans ses cadres étroits. On ne saurait davantage réaliser, en des exemples concrets, tous les cas comportés par le problème. Il faut donc employer, à en poursuivre la solution, un procédé analogue à celui des mathématiciens, et faire de la logique générale un calcul.

Avant d’aller plus loin, éclaircissons cette idée. Traiter la logique par le calcul, ce n’est pas, comme on pourrait le croire, appliquer purement et simplement à la syllogistique les procédés de l’algèbre, et rendre ainsi la logique tributaire de la mathématique. Si par mathématique on entend, avec l’opinion la plus répandue, la science des quantités et des grandeurs, il est incontestable que, même trai-