Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, IV.djvu/148

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
138
revue philosophique

de Xénophane, ni de Zénon, mais qu’il traite certainement de Mélissus, comme le prouvent et les déclarations de l’écrivain lui-même, et les doctrines qu’il expose ; que le second traite, non de Zénon, dont il dénaturerait la doctrine, mais de Xénophane, et le troisième de Gorgias ; que ce traité ne peut être, ni d’Aristote, dont il contredit gravement certains témoignages, ni de Théophraste, à qui il n’a été attribué qu’en vertu d’une fausse interprétation d’un texte de Simplicius ; mais que, d’après une indication importante de Diogène, et d’après le contenu même de l’ouvrage, il émane vraisemblablement d’un péripatéticien. Enfin, distinguant les trois parties de cet ouvrage au point de vue de la valeur historique, M. Zeller établit que la première et la troisième, conformes aux autres sources relatives aux mêmes doctrines, sont dignes de confiance, mais que la seconde, qui renferme des méprises manifestes, ne peut, à elle seule, constituer une autorité[1].

2. Les textes une fois rassemblés, il faut procéder à leur classement. À cet égard, on doit se défier des classifications que peuvent proposer certains témoins même considérables, en se plaçant à des points de vue dogmatiques qui leur sont propres. Ainsi Aristote[2], dans le premier livre de sa Métaphysique, donne une classification des anciens philosophes fondée sur sa propre distinction des quatre espèces de causes. Cette classification ne nous fait connaître que le rapport qui existe, selon Aristote, entre ces philosophies et la sienne propre.

Il faut demander le principe de la classification, avant tout, aux auteurs eux-mêmes. Par exemple, en ce qui concerne Parménide, la division de son περὶ φύσεως en τὰ πρὸς τὴν ἀληθείην et τὰ πρὸς δόξαν indique expressément la manière dont doivent être classés les textes qui se rapportent à sa doctrine.

À défaut d’indications suffisantes données par les auteurs eux-mêmes, on doit consulter les témoins les plus rapprochés de ces auteurs, et les plus capables d’entrer dans leur pensée et de se placer à leur point de vue. Ainsi, d’une manière générale, et sauf les réserves nécessaires, Aristote est bien meilleur juge que les modernes des termes dans lesquels étaient, à l’origine, posés les

  1. M. Zeller démontre de même, avec une grande rigueur (III, a, 557, 2e  éd.) que le περὶ ϰόσμου attribué à Aristote, n’est, ni d’Aristote, ni de Chrysippe, ni de Posidonius, ni d’Apulée ; qu’il faut renoncer à en trouver l’auteur, pour se borner à déterminer l’école et l’époque auxquelles il appartient ; et, que d’après son contenu, cet ouvrage doit être d’un péripatéticien stoïcisant et dater d’une époque comprise entre le commencement de la seconde moitié du premier siècle avant J.-C. et la fin du premier siècle après J.-C.
  2. I, 153.