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il n’a pas de point précis. Il ne faut pas prendre l’événement pour le devenir. Ce serait renverser l’ordre des choses. Le devenir est continuel, et l’existence se produit en même temps que lui. Le réalisme conclut de cette marche constante qu’il a en commun avec le temps, que le mouvement existe.

Si l’on écarte les hypothèses des sciences naturelles et que l’on s’en tienne aux seules perceptions, l’entrée en existence et la sortie peuvent se produire en un moment sans qu’il y ait un temps écoulé ; mais pour l’effectuer, il faut qu’il y ait un espace séparé par un autre espace, afin que l’objet entre dans un nouvel endroit.

Ceci nous amène à la théorie atomiste, selon laquelle les qualités, les sons, les couleurs ne sont que les mouvements vibratoires d’atomes, doués d’une force attractive et répulsive. Si nous l’admettons, il s’ensuit que la création du chaos primitif n’a jamais eu lieu, que seuls les atomes sont éternels. L’auteur repousse cette théorie, tout en admettant que la philosophie puisse admettre les mouvements des atomes.

Les atomistes sont embarrassés pour établir l’existence d’une force qui agisse à distance. Si les atomes ont une force attractive et répulsive, celle-ci n’est pas eux-mêmes, mais c’est une qualité qu’ils ont, et qui leur est extérieure ; par conséquent, ils sont divisibles comme l’espace, et s’ils doivent rester unis, il leur faut une intensité différente. D’ailleurs la question des atomes est très-controversée : la physique admet des atomes pondérables et impondérables, et tend à admettre leur équivalence ; la chimie, au contraire, en admet beaucoup et qui sont différents. L’on espère pouvoir analyser quelques-uns de ces atomes, par exemple ceux de l’azote, et prouver qu’il est composé de plusieurs éléments simples.

Maintenant, quelle est la nature des corps formés par les atomes, et comment naissent-ils ? Distinguons les corps organiques et inorganiques. Ceux-ci peuvent bien avoir leur origine dans des atomes, par exemple les cristaux, mais les hommes et les plantes ne sauraient en résulter. Pour toute solution, l’on a admis le principe vital. Mais cette force que l’on dit unie à l’action attractive et répulsive d6 l’atome, n’est que l’inconnu. La philosophie ancienne a bien admis des types constants dus à un créateur. L’idéalisme les soutient encore de nos jours. Mais Épicure les niait ; Darwin a posé le principe de la coopération de forces naturelles ; et aujourd’hui l’on se tient à la sélection sexuelle, l’hérédité des qualités, le combat pour la vie ; et le réalisme se met du côté de Darwin. Ce savant a posé une théorie du développement de l’organique sortant de l’inorganique qui a soulevé des discussions interminables.

Qu’est-ce que la vie ? Il est évident que la réponse sera différente, selon que l’idée en est bornée à l’organisme corporel, ou bien qu’elle embrasse aussi l’esprit. L’auteur cite, en la désapprouvant, la réponse hégelienne, que « la vie est, comme sujet et développement, essentiel-