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ANALYSES. — horwicz.Wesen und Aufgabe der Philosophie.

aux yeux des savants, elle n’a pas pour nous-mêmes tout l’intérêt qu’elle aurait eu si elle eût été moins générale. Elle termine d’une façon un peu vague et indécise un ouvrage qui vaut surtout par la méthode, la sûreté et l’exactitude scientifique.

Henri Marion.

Horwicz. Wesen und Aufgabe der philosophie, ihre Bedeutung fuer die Gegenwart und ihre Aussighten fuer die zukunft. (Nature et rôle de la philosophie, son importance dans le présent et ses vues pour l’avenir). Berlin, 1876.

M. Horwicz, bien connu des lecteurs de la Revue, s’est proposé, dans cette dissertation publiée parmi les Deutsche Zeit-und Streit-Fragen, de montrer que la philosophie n’est pas seulement une étude profitable à l’érudit, mais une science indispensable aux autres sciences et à la vie sociale, une condition essentielle de la santé morale des peuples civilisés. Au nom de la vérité il ose démontrer ce paradoxe : que la philosophie, malgré son caractère proprement spéculatif, est une science pratique au plus haut titre et qu’on a tort de diviser les intelligences travailleuses de l’humanité en deux classes séparées : les méditatifs d’une part, les hommes d’action de l’autre. Entreprise difficile, mais bien faite pour séduire un ami de la science et de la philosophie.

Cette discussion comprend deux parties : 1° Quel est le rang et le rôle de la philosophie parmi les autres sciences ? 2" Cet ensemble d’études abstraites et transcendantes peut-il avoir de l’influence sur la vie morale des sociétés ?

I. Le sceptique le plus résolu ne saurait nier l’existence des problèmes dont la philosophie fait son objet, et, par conséquent, reconnaît d’une façon implicite la nécessité de cette recherche de la vérité dernière. Mais il s’en faut de beaucoup que les fidèles de la philosophie eux-mêmes soient d’accord sur la définition de cette science. Trois conceptions distinctes se partagent la faveur du public. La première, toute scolastique, considère la philosophie comme une science historique:ce serait une sorte de tradition scientifique, une étude spéciale de ce qui a été pensé par d’autres avant nous. Herbart appelait ces sectateurs arriérés de la philosophie « des lecteurs infatigables, mais des penseurs paresseux. »

Ces érudits sans originalité sont inoffensifs et même rendent des services. Il est une autre classe d’esprits, celle des savants spéciaux qui partagent en lots multiples le domaine de la philosophie, attribuent ceux-ci aux sciences particulières, et nient ensuite l’existence de toute synthèse supérieure. Suivant cette seconde conception il y aurait une « philosophie de l’espace », dépendante de la mathématique ; une psychologie; une cosmologie générale, suite de l’astronomie rationnelle.