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ANALYSES. — h. spencer.Principles of Sociology.

et absorber l’aliment, et pour elle-même et pour le corps entier. D’abord en rapport direct, ces deux systèmes, à mesure qu’ils se diversifient et se compliquent chacun de son côté, se complètent par un troisième système intermédiaire, portant à toutes les parties du premier la nourriture préparée par le second : ce troisième système, constitué d’abord par quelques rares canaux très-simples, devient à la fin l’appareil circulatoire avec ses mille ramifications. Eh bien ! de même, une société offre comme premier signe d’organisation véritable deux classes : celle qui commande et veille aux rapports de la communauté avec le dehors ; celle qui obéit, travaille et produit à l’intérieur. Plus tard seulement une classe intermédiaire apparaît, mettant en communication le maître et l’esclave, la classe dirigeante et la classe productrice, lesquelles, en s’augmentant et en se diversifiant, se séparent de plus en plus. « Il est indéniable que les classes occupées des travaux manuels (tirant de la terre les produits utiles, ou les préparant pour la consommation), alimentent et sustentent la société, exactement comme les organes de l’appareil nutritif entretiennent la vie de l’animal. Il n’est pas moins certain que la classe qui achète et revend, en gros ou en détail, les produits de toute sorte, et par mille canaux les distribue partout à mesure des besoins, accomplit la même fonction que dans un corps vivant le système vasculaire… Enfin, de même que, dans le corps, le cerveau, les organes des sens et les membres qu’ils guident, situés loin des surfaces alimentaires, sont nourris par la circulation, ainsi, dans la société, les classes à qui appartient la direction, ne reçoivent qu’indirectement, par de nombreux intermédiaires, les produits préparés souvent loin d’elles par les classes laborieuses. »

Considérez maintenant tour à tour chacun de ces systèmes dans son développement. Dans le système digestif d’un animal, le canal alimentaire tout entier s’adapte aux matières (animales ou végétales) mises en contact intérieur avec lui ; et les diverses parties successives de ce canal acquièrent les diverses propriétés nécessaires à l’élaboration de ces matières, selon qu’elles arrivent à tel ou tel degré de préparation : en un mot, ce sont les substances étrangères servant à la nutrition qui déterminent et les caractères généraux de l’appareil nutritif et les caractères propres de ses parties. Or, la même loi préside à l’évolution du système industriel dans une société. Il est déterminé d’une manière générale par les ressources en minéraux, animaux et végétaux que rencontre la population travailleuse ; et la formation de telle ou telle industrie spéciale dans telle partie de cette population, est déterminée par la différence des produits naturels dans les diverses contrées. Un grand centre industriel (Birmingham, Manchester, Sheffield), se forme au point le plus favorable, en somme, à tous ses approvisionnements ; comme une glande apparaît à l’endroit du tube digestif où elle trouve à exercer sa fonction.

Même analogie en ce qui concerne le système distributeur. « Une société du moyen-âge, formée de petits états féodaux peu subordonnés