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beurier. — philosophie de m. renouvier

distinctives sous lesquelles seules la conscience est possible, il s’en faut que l’analyse des catégories nous ait conduit à un résultat purement négatif. La synthèse totale est aprioriquement impossible ; mais qui peut fixer, soit à priori, soit à posteriori, les limites de la synthèse légitime que pourront opérer les sciences ? La réduction de l’hétérogène à l’homogène est illogique ; mais les relations, les accords des faits particuliers et l’harmonie générale, d’où naît l’ordre universel, ouvrent un champ indéfini tant aux spéculations des philosophes qu’aux recherches des savants. D’ailleurs, la simple étude des catégories, considérées d’un point de vue aussi abstrait qu’on voudra, emporte des conclusions et des présomptions théoriques de la plus haute importance. Même lorsqu’on doit se résigner à ne pas tout connaître et à ne se pas poser certains problèmes, c’est déjà quelque chose, c’est déjà beaucoup que de savoir quelles sont les lois générales inhérentes à la pensée, et dont la pensée ne saurait se détacher dans une explication quelconque, si hypothétique qu’elle fût, de la nature intrinsèque et de l’ordre de corrélation des réalités qui composent le monde. Ainsi sont éliminées toutes les théories contraires à une conception rationnelle de l’ensemble des choses connaissables ; ainsi, en même temps, sont établies l’existence, la distinction et les rapports essentiels, sinon l’enveloppement nécessaire et fatal, des éléments primordiaux qui doivent trouver leur examen et leur place dans la plus restreinte des discussions ou des constructions philosophiques. Cela seul suffirait pour poser les règles d’une logique formelle portant sur la démonstration des possibles, et pour établir les fondements d’une science ou logique critique de la certitude dans l’ordre des faits réels et de leurs relations.

Bien mieux, on vient de le voir se dessiner assez nettement, quoique d’une manière encore un peu abstraite, les grandes lignes d’une conception générale de la réalité. La raison en est bien simple, c’est que les lois de la logique générale ne peuvent être que celles de la conscience, et que celles-ci, à leur tour, sont forcément les principes de toute science. Ne l’oublions pas en effet : l’être-représentatif ne connaît rien qu’en lui, que par lui, et que par rapport à lui, c’est-à-dire par ressemblance avec lui.

Il n’y a donc pas et il ne saurait y avoir une distinction fondamentale entre les matières traitées dans les deux premiers essais. La Logique de M. Renouvier est déjà psychologie, comme sa Psychologie est encore logique. Aussi, dans cet exposé d’ensemble du nouveau criticisme, ai-je fait de continuels emprunts aux deux ouvrages simultanément, mais surtout à la Logique, qui, grâce surtout aux développements et éclaircissements de la seconde édition, contient