Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, III.djvu/297

Cette page n’a pas encore été corrigée

LIARD. — LA LOGIQUE DE STANLEY JEVONS 287

une identité dont les deux membres peuvent être unis par le signe =. Bien qu'il se défende de considérer la logique comme une branche de l'algèbre, il ne fait donc, au fond, que renouveler, avec un appa- reil plus simple et d'aspect moins mathématique, la tentative de Boole, qu'il condamne pour les raisons que nous avons rapportées. Il a bien adopté un signe spécial de la relation indéterminée; mais il ne s'en sert pas une seule fois dans le développement de son sys- tème ; toute proposition y est exprimée sous forme d'équation. Si donc, M. Jevons voit dans l'algèbre des mathématiciens une logique développée, en fin de compte, il fait de la logique une algèbre élé- mentaire . Si la science de la qualité et celle de la quantité reposent sur une base commune, celle qu'il leur donne est mathématique, ce qui constitue au profit de la science de la quantité une prééminence qu'on ne lui reconnaissait pas d'abord.

Cette prééminence est-elle justifiée ? En d'autres termes, toute proposition revient-elle, en dernière analyse, à une équation? En fait, il semble qu'une .relation de quantité soit engagée dans toute relation de qualité, car les termes, tels que mammifère et vertébré, en même temps qu'ils connotent certaines propriétés déterminées, dénotent un certain nombre d'objets. Si donc on les unit en une pro- position, n'entendra-t-on pas d'abord que les qualités connotées par le prédicat coexistent avec celles que connote le sujet, puis, con- séquence de cette première assertion, que les objets desquels nous affirmons le prédicat sont ceux que dénote le sujet? En ce sens, il ne serait pas inexact de dire que, dans toute proposition, le prédicat qui, pris à part, peut avoir une extension plus grande que celle du sujet, comme c'est le cas pour vertébré au regard de mammifère, est pensé imphcitement avec une extension égale à celle du sujet ; l'at- tribution n'a-t-elle pas en effet pour résultat d'incorporer le prédicat au sujet? Il semble donc qu'au point de vue de la quantité des termes, la proposition soit une équation.

Il n'en est rien cependant; et si Ton pousse plus avant l'analyse, l'analogie superficielle que nous venons de signaler s'évanouit. Soient les équations suivantes : 8 = 5 + 3 ; la somme des trois angles d'un triangle rectiUgne = deux angles droits. On remarquera qu'en chacune d'elles, nous avons affaire à deux groupes distincts d'objets : ici, le groupe 8 et le groupe 5 + 3; là le groupe : somme des trois angles d'un triangle rectihgne et le groupe : deux angles droits. Le signe = qui les unit marque qu'en chaque équation le premier groupe peut être substitué au second, et vice versa, c'est-à- dire que former le nombre 8 et former la somme 5 + 3 sont deux opérations équivalentes, que construire les trois angles d'un triangle

�� �