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ANALYSESferrier. — Fonctions du Cerveau.

comme nous verrons que cela a lieu à la suite de la destruction des autres régions excitables (1-12). Or il n’en rien ; ce que l’on observe, ce sont des troubles de la sensibilité : les mouvements déterminés par l’excitation électrique sont donc de nature réflexe.

M. Ferrier admet dans le cerveau plusieurs espèces de centre : des centres moteurs, des centres sensitifs et peut-être des centres d’arrêt. Centres sensitifs. La destruction du pli courbe 13. 13’ produit une amaurose dans l’œil du côté opposé. Quand la lésion n’affecte qu’un côté du cerveau, la vision revient au bout de quelque temps dans les deux yeux ; mais la cécité est absolue et permanente, si les deux plis courbes sont détruits.

La destruction des surfaces désignées par 14. a pour effet la surdité de l’oreille du côté opposé, mais c’est un phénomène difficile à constater, et il vaut mieux détruire la région indiquée des deux côtés du cerveau : on observe alors une surdité absolue. M. Ferrier compare les phénomènes qui résultent de l’excitation de ces centres aux mouvements d’attention provoqués par un grand bruit.

La sensibilité tactile serait localisée dans le grand hippocampe et le crochet, à la face inférieure et interne des hémisphères. La destruction de ces parties d’un côté serait suivie d’une abolition de la sensibilité aux piqûres, aux pincements, à la chaleur, du côté opposé du corps ; il y aurait en même temps une sorte de parésie, liée à la perte de la sensibilité tactile.

C’est dans l’extrémité du lobe temporo-sphénoïdal (région ombrée entre 14. et 15) que seraient les centres du goût et de l’odorat. Ces centres n’ont pu être précisés d’une façon exacte, parce que la partie du cerveau ici en cause est difficilement accessible. Dans ses expériences, M. Ferrier séparait en masse l’extrémité du lobe temporo-sphénoïdal ; aussi observait-il, en même temps que la perte du goût et de l’odorat, des troubles de la sensibilité tactile et auditive, dont les centres étaient plus ou moins intéressés par le traumatisme. Quand la lésion est unilatérale, le goût et l’odorat seraient affectés du même côté.

En détruisant le lobe occipital (la partie du cerveau en arrière de 13’), M. Ferrier n’a pu constater aucune modification sensorielle ou motrice. Le seul phénomène qu’il ait observé, c’est que les singes opérés avaient perdu l’appétit pour les aliments, tout en conservant le goût pour les boissons, ce qu’il attribue à une perte de la sensibilité organique.

Ces conclusions de M. Ferrier sur les centres sensitifs sont loin d’être acceptées par la majorité des expérimentateurs. Il leur manque d’avoir été vérifiées chez l’homme. En effet, les troubles sensoriels sont difficiles à constater chez les animaux, à cause de leur nature subjective ; il est souvent impossible de distinguer si telle réaction est de nature réflexe ou non ; et l’homme soûl peut dire : je ne vois pas, je ne sens pas, je n’entends pas. Avant d’accepter les résultats que nous venons d’exposer, il faut donc se tenir sur la réserve et atten-