Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, III.djvu/161

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
151
e. de hartmann. — un disciple de schopenhauer.

ment pour ce point de vue « que la valeur d’un accord accidentel. » Mais que la dialectique réelle ait le droit de se vanter de cette tolérance large du non-sens et de s’élever pour cette raison au-dessus de la logique, qui est si intolérante à l’égard de l’illogique, une telle prétention n’est nullement justifiée ; car cette tolérance est un peu chèrement achetée au prix de la renonciation absolue à toute explication, et à tout calcul ; elle peut seulement être désignée comme la castration de la raison par elle-même. Si Bahnsen pensait sérieusement que la raison est seulement un chiffon tombé par hasard sur le grand tas de balayures du non-sens universel dialectique, ce serait là une déclaration en. faillite de la philosophie, qui lui aurait fait perdre le droit d’élever la voix en qualité de philosophe.

C’est pourquoi nous voulons bien admettre en sa faveur que cette conception de la dialectique réelle n’est qu’une exagération capricieuse d’une pensée originairement différente et plus nettement définie. Nous croirons que la raison, contrairement à sa déclaration expresse, possède à ses yeux une valeur déterminée non-seulement dans la sphère subjective, mais même dans le monde objectif. Nous dirons en outre que l’accord entre cette raison universelle objective et la raison subjective n’est pas seulement accidentel, mais qu’il repose sur une homogénéité tout aussi essentielle que l’accord de tous les individus dans la nature de la volonté. Enfin nous admettrons que la source de cet accord entre la raison objective et subjective doit être cherchée dans la constitution logique du contenu de la volonté lui-même. De cette manière la voiture de Bahnsen est remise dans une voie raisonnable, mais il faut retenir que les conséquences les plus rigoureuses de sa dialectique réelle sont tout aussi folles que leur justification est insuffisante et insoutenable.

La raison universelle admise partiellement par Bahnsen sera obligée de réclamer un double domaine : d’abord toute l’étendue de celui où règnent les lois générales de la nature, et en second lieu celui des actes téléologiques de l’instinct, ainsi que de l’activité formatrice organique. Quant au dernier domaine, Bahnsen sera obligé de rectifier son opinion au sujet de la valeur purement subjective de la téléologie, comme il a déjà rectifié celle relative au domaine purement subjectif du logique. En vérité, il ne lui reste pas d’autre parti à prendre, aussi longtemps qu’il reste attaché à cette doctrine fondamentale individualiste, que la volonté individuelle construit son organisme d’une manière adéquate à son caractère ; car par là on soutient déjà une action téléologique de la monade centrale sur les autres monades constituant l’organisme, laquelle action ne trouve dans les manifestations de l’instinct animal et