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ribot. — psychologie ethnographique en allemagne

hommes forment un groupe, vivent ensemble, constituent une société, il sort du consensus de tous ces esprits individuels (subjectifs), un esprit commun (objectif) « qui devient à la fois l’expression, la loi et l’organe de l’esprit subjectif. » Prenons pour exemple un des éléments du Volkgeist, le langage : il est d’abord produit individuellement ; mais bientôt il devient l’expression objective de la pensée individuelle ; sa loi, parce qu’il est la forme donnée de la pensée et de plus l’organe, l’instrument de tout progrès ultérieur du langage. On pourrait faire la même remarque sur tous les autres éléments de l’esprit social. Du consensus de ces divers éléments, de leur action et réaction réciproque, résulte « la formation d’un type psychophysique » qui est le résumé d’un peuple.

Cet « esprit objectif » a un support (Trager). Est-ce la totalité des individus ? Pour Lazarus, c’est simplement leur moyenne. Dans une nation, il faut retrancher d’abord les enfants, chez qui le développement ne s’est pas produit, les idiots, les esprits arriérés ; il faut retrancher d’autre part les génies exceptionnels : bref ce qui est trop au-dessous ou trop au-dessus. Le niveau moyen qui reste, est le support de l’esprit objectif.

Un point nettement traité par Lazarus et Steinthal, c’est la détermination des éléments constitutifs du Volkgeist. Ces éléments sont le langage, la mythologie, la religion, le culte, la poésie populaire, l’écriture comme base de la conscience historique, l’art, la vie pratique, les mœurs, la loi écrite, les occupations, la vie de famille, enfin l’action réciproque de ces diverses manifestations. Leur étude constitue l’œuvre de la psychologie des races. Il s’agit, par elles, d’avoir la connaissance psychologique d’un peuple dans son esprit et dans ses actes, « de découvrir les lois suivant lesquelles son activité idéale — dans la vie, la science et l’art — se développe, s’étend ou se resserre, s’élève ou s’abaisse, s’affine et se vivifie, ou s’affaiblit et s’émousse. Pour n’être pas une fiction, la Psychologie des races doit non pas donner un tableau vague et arbitraire des qualités intérieures (psychiques) d’un peuple, mais trouver la source d’où elles découlent toutes. Elle doit saisir non pas telles et telles directions particulières et accidentelles de son développement, mais leur totalité avec les lois qui régissent ce développement » (Leben der Seele, t. I, p. 337-338). Elle doit notamment expliquer la formation des races, déterminer les causes qui ont fractionné l’espèce humaine en peuples divers et montrer, téléologiquement, quels profits l’esprit de l’homme en a tirés pour son développement (Ibid., p. 335).

Les sciences naturelles sont sorties de l’histoire naturelle. Par un