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ribot. — psychologie ethnographique en allemagne

Sur le second point, Waitz étudie longuement les variations psychologiques des races humaines par rapport aux variations du crâne, il trouve qu’il n’y a rien à induire de là et conclut : que pour la psychologie, il n’y a pas de différence spécifique entre les races humaines (dass es keine specifischen Unterscheide der Menschenracen in Rücksicht des geistigen Lebens gibt, t. I, p. 393). D’où vient donc qu’il y a entre elles de si grandes différences, en ce qui touche la culture générale et la civilisation ? Car si l’on rejette l’innéité des différences, il faut bien dire comment elles sont acquises. — Pour Waitz, tout s’explique par le climat, les migrations, les idées religieuses : mais, avant tout, le climat, seule cause première ; différence primitive d’où découlent logiquement toutes les autres différences, de nourriture, d’habitation, d’occupations, de régime politique, etc.

Sans insister, on voit que plusieurs de ces assertions ne sont plus soutenables aujourd’hui, ou du moins se soutiendraient autrement. Au contraire, les cinq volumes consacrés à l’anthropologie descriptive restent encore le plus beau répertoire de faits qui existe pour l’étude des races à l’état de nature, si l’on excepte les monographies. Les publications spéciales ont complété ou rectifié, sur plusieurs points, l’œuvre de Waitz ; mais aucun travail d’ensemble ne l’a remplacé. Son deuxième volume est consacré aux nègres et aux races analogues (Nubiens, Abyssiniens, Gallas, Malgaches, Cafres, Somalis), à leur culture matérielle, leur vie de famille, leur organisation politique, leurs coutumes, leur religion, leurs qualités intellectuelles, leur tempérament et leur caractère[1]. — Une étude pareille (tomes III, X-IV) est consacrée aux races aborigènes de l’Amérique depuis les Esquimaux jusqu’aux Araucans et aux peuples semi-civilisés du Mexique, du Pérou et de l’Amérique centrale. Les deux derniers volumes sont consacrés aux races Océaniennes. Ils sont en grande partie l’œuvre de George Gerland ; car Waitz est mort à 43 ans, le 21 mai 1864, laissant son œuvre inachevée.

Waitz n’avait visité aucun des peuples qu’il décrit ; c’est aux voyageurs de tous les pays qu’il fait ses emprunts. La liste de ses lectures à cet égard est immense. Nul, d’ailleurs, n’eut un sentiment plus vif de la grandeur et de la difficulté de la tâche. Il souhaitait, pour accomplir son œuvre, dit Gerland, les forces unies du zoologiste, du géologue, du psychologue et du linguiste. Partout aussi, son sens critique se fait jour. Il comprend que souvent les renseignements des voyageurs peuvent n’être que des contre-sens ; que

  1. Voir en particulier un très-bon portrait du nègre avec ses impulsions soudaines et désordonnées, p. 202 et suiv.