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admet généralement que les phénomènes sont déterminés par elle, et d’une manière nécessaire. Il n’en est pas de même de la cause finale sur laquelle de violentes discussions se sont élevées. Mamiani professe que » la finalité est non un fait de la nature, mais une intention de son auteur. » La causalité efficiente résulte de la nature des choses ; elle exprime leur constitution essentielle ; la causalité intentionnelle a sa source hors de la nature et n’est point directement révélée par les dispositions des parties de la matière, lesquelles ne montrent qu’un mécanisme rigoureux. « Appliquer, dit-il, aux heureuses conspirations de séries multiples de phénomènes, le nom d’intention et de but, c’est abuser grandement de la valeur des mots. » Tant qu’on reste sur le terrain de l’observation scientifique, on est en présence non d’un système de fins et d’un enchaînement de volontés, mais d’un tissu de phénomènes rigoureusement déterminés.

Il en est autrement au point de vue métaphysique. « Ici l’école italienne se trouve en bien meilleure position que l’auteur du livre dont nous parlons. En effet notre théorie des intelligibles fait de l’existence d’une cause première intelligente et préformatrice, une affirmation résolue et démonstrative. Et à coup sûr l’intelligibilité essentielle et absolue des vérités nécessaires et aussi de leurs éléments qui sont les idées, manifeste avec évidence le rapport qu’ont les apparences extérieures avec une intelligibilité interne infinie (manifesta con evidenza il rapporte esteriore perpetuo d’una intelligibilita interna infinita) ; si l’on considère surtout que seule la pensée incréée peut se rendre intelligible en substance à toutes les intelligences, et que, au fond, l’intérieur et l’extérieur sont deux aspects et deux relations d’un même être. »

Telle est en somme la doctrine de Mamiani sur les causes finales : le principe des causes finales n’est pas un principe constitutif de la connaissance de la nature ; il ne trouve pas sa raison dans une intelligence immanente au monde ; il se rattache à l’intelligence divine et aux éternelles idées qui de haut, sans se mêler à la matière, lui ont communiqué l’ordre et l’harmonie.

Maintenant qu’on relise les chapitres de M. Janet, sur les mêmes questions, et qu’on recherche les différences entre sa doctrine et celle de « l’école Italienne » ; on verra jusqu’à quel point M. Mamiani est autorisé à s’inscrire en faux contre l’assertion que nous émettions tout à l’heure. Que si l’on veut se rendre compte des causes qui expliquent cette étonnante conformité entre deux écoles dont le développement a été incontestablement autonome, on n’a qu’à songer à la source commune où des deux côtés une même tradition a été puisée.


Reale Istituto Lombardo di Scienze e Lettere. (Comptes-rendus de juin 1876. Vol. IX, fasc. XII.)

Nous signalerons un travail de Mantegazza sur L’expression de la