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analyses. — fontana. Idea per una filosofia.

du principe contemplatif, et histoire du principe actif. D’une part la religion et la science, d’autre part l’art, l’industrie et le commerce ; tels seraient, d’après le chapitre IV, les objets de la philosophie de l’histoire. Mais, après avoir insisté sur cette division et sur le programme qui en résulte, l’auteur y renonce et suit une tout autre voie. C’est sans doute parce que le principe actif ou la liberté est subordonné suivant lui entièrement au principe contemplatif (p. 62). Quoi qu’il en soit, la religion dans l’Histoire devient à partir de ce moment l’objet principal du livre. Le christianisme est longuement étudié comme événement historique. Cela fait, une série de chapitres se présentent dont nous avons peine à saisir le lien. En voici les titres : L’Humanité, Les Nations, La Civilisation ; Concordance de l’Histoire avec les données spéculatives ; Progrès de la liberté ; De la Liberté religieuse et civile. L’obscurité qui enveloppe le dessein général de l’auteur vient du mélange incessant qu’il a fait de l’histoire et de la discussion théorique, parcourant par bonds en quelque sorte la suite des siècles, tantôt dans un sens, tantôt dans un autre, revenant à l’homme préhistorique après avoir traité de l’avènement du christianisme, n’hésitant même pas à toucher plusieurs fois le même sujet si le cours de la discussion l’y entraîne. Le lecteur, déjà désorienté par ce défaut de régularité dans la composition, n’est pas moins troublé par le style de l’auteur, style prophétique, solennel, roulant une multitude de phrases symétriques et de mots sonores, conforme du reste en tous points au ton obligé de la philosophie de l’histoire en Italie. La philosophie de l’histoire est, pour beaucoup de savants hommes de ce pays, une science nouvelle, extraordinaire, inouïe, une sorte de révélation. « Je crois » ou « il me semble » sont des formules modestes auxquels on renonce dès qu’on se fait l’interprète de l’Idée ; on écrit : « La philosophie de l’histoire n’admet pas, la philosophie de l’histoire proclame… » Écoutons, du reste, cet accent inspiré dans une phrase prise au hasard du livre que nous analysons : Négligeant de vains détails d’érudition, « la philosophie de l’histoire, dit M. Fontana, s’élève plus haut, et des langues, des légendes, des monuments, des lois, elle s’en va dégageant l’Idée suprême capable de conduire l’humanité à travers les vicissitudes des siècles ; prophétisant l’avenir (vaticinando), elle prononce sur les œuvres de l’art et de la pensée la parole souveraine qui en explique la cause et le concept, qui révèle le caractère, le génie propre, la dissemblance des nations… etc. (p. 9). » Deus, ecce Deus ! Évidemment l’écrivain n’est plus de plain-pied avec nous ; il ne nous soumet plus des propositions à discuter ; il promulgue des oracles. Qu’y a-t-il au fond de tout cela ? Et qu’enseigne-t-elle donc, cette science merveilleuse ? Rien que de très-simple, et toujours la même chose : à savoir que l’homme connaît le mieux et y aspire. C’est la théorie déjà ancienne du progrès indéfini, rien de plus, rien de moins. Je me trompe. Cette théorie est corrigée en un point important. L’humanité, d’après M. Fontana, n’a jamais été dans l’état de barbarie originelle que semble impliquer le système. Autrement elle n’aurait jamais trouvé en elle-