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conceptions naïves de la terre et du ciel qui suryvent encore à l’époque des épopées, de la foi universelle aux apparitions des dieux que l’on imagine derrière tous les phénomènes naturels, si bien que pas une feuille d’arbre ne remue, pas un rayon de lumière ne brille, pas une nuée ne s’élève dans l’azur sans qu’on y voie un signe divin. Il n’y avait certes alors ni astronomie ni m.étéorologie, et pas plus de physique ou de physiologie que de chimie. Le monde était un miracle perpétuel, comme il fut toujours en Judée ou en Arabie, et plus tard au temps de notre moyen âge. Le commencement et la fin de toute science, l’hypothèse était inconnue. Après quelques générations cependant, on observe, on découvre des uniformités naturelles dans le cours des choses, et l’on s’élève à cette notion de lois nécessaires et universelles qui est l’unique fondement des sciences. Dès que celles-ci ont une méthode, que ce n’est plus le hasard, mais l’induction et l’hypothèse qui président à l’observation, elles se séparent de la philosophie spéculative qui d’un coup d’aile prétendait s’élever aux premiers principes des choses. Enfin les progrès de la mécanique, l’invention des instruments de précision et la pratique des expériences donnent une portée et une solidité jusqu’alors inconnues à l’observation méthodique des phénomènes.

Le moyen de nier la haute perfection où parvinrent les mathématiques et la géométrie dans la patrie de Pythagore et de Platon, alors que les livres d’Euclide, après plus de deux mille ans, forment encore le fondement de cette discipline de l’esprit humain dans la patrie de Newton ? Les observations astronomiques des Hellènes ont été infiniment plus exactes que celles des anciens contemplateurs du ciel en Babylonie et en Égypte. Il n’y a pas jusqu’au principe du système copernicien, la position centrale du soleil, qui ne se trouve dans Aristarque de Samos. Avant et après Aristote, que de descriptions exactes du monde des plantes et des animaux, que d’investigations sagaces de la structure interne des corps organisés ! C’est à Alexandrie que les résultats scientifiques des conquêtes du héros macédonien furent appréciés et utilisés pour les premiers essais d’une morphologie comparée, s’élevant des organismes les plus inférieurs à l’homme. Déjà Pline l’Ancien a pu jeter un regard singulièrement pénétrant sur la place de l’homme dans l’univers. La physique expérimentale des anciens comprend les principes de l’acoustique, de l’optique, de la statique, et ceux de la théorie des gaz et des vapeurs.

La médecine scientifique, qui trouva dans Galien de Pergame sa plus haute expression, avait déjà découvert le rôle et l’importance des nerfs. Le cerveau, si longtemps considéré comme une masse