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prétendus axiomes de l’arithmétique sont inutiles ; telles sont les propositions que le tout est plus grand que la partie, que deux quantités égales à une même troisième sont égales entre elles, etc. Je vois tout aussi bien et même mieux la vérité du cas isolé que celle de la proposition générale. Ces prétendues vérités a priori sont donc des théorèmes induits provenant d’une généralisation de cas particuliers.

On voit aussi par là comment l’idée d’un nombre acquiert des prédicats successifs. Le nombre 7, par exemple, m’apparaît d’abord simplement comme nombre 7, puis comme somme, puis comme nombre premier, ensuite comme nombre impair, etc.

Nous avons jusqu’à présent deux opérations directes et deux opérations inverses ; poursuivons notre route.

Si les facteurs d’un produit sont égaux, on convient de simplifier la notation, et au lieu de 5 X 5, on écrit 52. De même on écrira : 53, 54 etc. Et l’on dit de 5 qu’il est élevé à la 2e à la 3e à la 4e etc., puissance.

On ne peut intervertir la base et l’exposant : ainsi 52 n’est pas égal à 25. Ici encore, la démonstration de cette proposition négative va du particulier au général. De là il résulte qu’à l’élévation aux puissances correspondent deux opérations inverses : 1o Étant donnés la puissance et l’exposant, retrouver la base ou la racine ; 2o Étant données la puissance et la base, chercher l’exposant. Cette dernière opération est, comme on le sait, l’origine de la théorie des logarithmes.

L’élévation aux puissances est une manière nouvelle de composer des nombres. Mais de même qu’il y a des nombres qui ne sont pas des produits, de même il y en a qui ne sont pas des puissances. De là, les opérations inverses amènent des racines ou des exposants qui ne sont pas nombres ; ce sont les nombres incommensurables[1]. Les expressions symboliques qui les désignent ont donc une naissance semblable à celle de la fraction ou du nombre négatif.

L’arithmétique s’arrête-elle ici ? pas le moins du monde, car l’analogie suggère une série indéfinie de nouvelles opérations. Si, par exemple, l’exposant est égal à la base, on peut convenir de modifier la notation et d’écrire 25 au lieu de 55 ; et l’on aura encore une opération directe et deux opérations inverses. Et ainsi de suite (Voir plus loin).

À mesure que l’on crée arbitrairement de nouveaux symboles, et

  1. Il faudrait un terme spécial pour ces sortes de nombres ; le terme d’incommensurable est trop général et s’applique, par exemple, au rapport de la circonférence au diamètre, qui n’a pas la même origine.