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l. carrau. — la philosophie de m. g. h. lewes

sensibles (μετὰ τὰ φυσιϰὰ). Dans chaque science particulière, dans chaque problème particulier, pourrait-on dire, il y a ainsi un point de vue positif ou expérimental, et un point de vue métaphysique : le métaphysique se superpose exactement au positif, comme l’abstrait au concret, comme le général au particulier, comme l’hypothèse aux faits qu’elle domine en les expliquant.

Mais l’esprit ne s’arrête pas là. Ces spéculations, qui ramènent à un symbole général les faits et les lois directement observés, il les généralise à leur tour ; il les explique ou cherche à les expliquer par des conceptions plus élevées encore, symboles de symboles, et la systématisation de ces hypothèses d’ordre supérieur, c’est proprement la métaphysique. Le degré de généralité, voilà donc en réalité la seule différence qui sépare la métaphysique de la science. La métaphysique est à la science ce que l’algèbre est à l’arithmétique : la science a pour objet les rapports des phénomènes entre eux, ou les lois ; ce qu’étudie la métaphysique, ce sont les rapports de ces rapports, les lois de ces lois.

Si la métaphysique dépasse ainsi les données de l’expérience, elle n’en est pourtant pas absolument indépendante : elle y trouve à la fois le fondement" solide et l’incessant contrôle de ses plus hautes conceptions. Toute généralisation part des faits, et, de proche en proche, y peut et y doit être ramenée. Une hypothèse métaphysique n’est recevable que si elle peut être traduite en termes de l’intuition, ce qui revient à dire qu’elle doit toujours être d’accord avec l’expérience, actuelle ou possible, ou avec des généralisations directement tirées de l’expérience. — Pour revenir à l’exemple précédemment employé, la théorie de Laplace sur la formation du système solaire ne peut être vérifiée par l’observation des mouvements des planètes : mais elle est conforme aux généralisations empiriques que cette observation révèle, elle les explique mieux que toute autre, et cela suffit.

De la métaphysique à la science, des données positives de celle-ci aux conceptions spéculatives de celle-là, le passage est donc toujours possible ; la pensée monte et descend par une série d’échelons intermédiaires ; c’est la même méthode qui superpose les unes aux autres des généralisations, vérifiables, en dernière analyse, par le témoignage des sens. Il n’en est plus de même quand on prétend s’élever du point de vue métaphysique au point de vue métempirique.

« Supposons que l’astronome, après avoir exposé le côté positif et le côté spéculatif du problème des mouvements planétaires, soit conduit à exprimer sa manière de voir relativement au dessein que ces lois ont eu pour mission de réaliser dans la création, à la sagesse