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définitions logiques rigoureuses. En géométrie je ne puis définir l’espace et la forme, mais je puis définir la perpendiculaire, l’oblique, le triangle, le cercle. C’est dire que je ne puis définir en algèbre la quantité, en arithmétique, le nombre.

La création des symboles ou des différents langages algorithmiques a donc marché parallèlement à la création des sciences symbolisées ; les symboles se sont, pour ainsi dire, engendrés naturellement. L’arithmétique a imaginé les signes des nombres, 1, 2, 3… L’algèbre, à son tour, a exprimé les quantités par les signes, a, b, c… Les fonctions, c’est-à-dire les relations qui lient entre elles certaines quantités, ont servi à définir les figures. Le mouvement d’un corps a pu être, alors, représenté par une figure, puis les forces physiques, par des modifications du mouvement des molécules. Les forces chimiques et biologiques n’étant pas encore actuellement assez bien connues pour être caractérisées par des formules symboliques, dans le vrai sens du mot, échappent à la pensée.

C’est la partie conventionnelle des notations qui donne lieu à l’extension idéale des sciences. Nous verrons plus tard comment, en arithmétique, on arrive aux idées de nombres fractionnaires et de nombres incommensurables, comment en algèbre on est conduit à parler de quatrièmes, de cinquièmes puissances, de quantités imaginaires, etc. On comprendra dès lors qu’on peut créer une géométrie à quatre dimensions ou telle que les trois angles n’y soient pas égaux à deux droits. L’homme, une fois en possession de formules générales trouvées à l’occasion de cas particuliers, peut alors les appliquer à d’autres cas particuliers qu’il ne trouve que dans sa fantaisie créatrice et inventer ainsi des sciences imaginaires. Donc, pour en revenir à un point déjà traité, s’il est vrai que les mathématiques ont des formules tellement générales qu’on peut en faire l’application non-seulement à tous les phénomènes réels, mais à tous les phénomènes possibles, c’est là un avantage que toutes les sciences peuvent posséder un jour. C’est la propriété inhérente à toute formule hypothétique.

V. — De la place de là logique dans l’ordre des sciences.

Il nous reste maintenant à déterminer la place de la logique dans l’ensemble des sciences. On est libre sans doute jusqu’à un certain point de rattacher à la logique des théories qui lui sont plus ou moins étrangères ; on peut étendre ou rétrécir dans de certaines li-